SEJOUR DANS L'HERAULT ET LE GARD 2002/2018 BRAN DU 27 08 AOUT
CARNET DE VOYAGE SUD-EST
GARD ET HERAULT 2002 A DOMITILLE
BRAN DU
La vraie soif est chaleur où la flamme se baigne....
« Là, au bout du champs un tas de pierres comptables des saisons accumulées ; monticule d'une mémoire et d'histoires écroulées d'un temps de peine et de joie, de pain et de paille, de sarments et de blé, de regain et de finalité. »...
« L'arbre porte le nid. Le nid porte l'envol, ainsi les feuilles et le chant bien au-delà des racines. »
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Randonnée dans l'Hérault :
Du sommet du Fargeas nous voyons les monts enneigés ; ceux de l'Aigoual et ceux de Lozère...
Toute cette neige que nous n'atteindrons pas sans le secours de la pensée...
(Tout ce duvet de neige au féminin de tes sommets)
Trouver le « lieu et la formule » dit le poète ; y instaurer ou, plus exactement, restaurer, la relation vivifiante, avivée, porteuse, apporteuse, d'équilibre, d'harmonie...
Générer en cet espace qui ne peut être que sacré, consacré de vents et de nuages, de chèvrefeuilles et de mûriers, les pensées et les actes, concordants, ajustés...
Pénétrer, être pénétré, fusionner dans l'état éveillé, exalté, de concorde et de correspondance....
Etre toute conscience, toute félicité...
Cause et effet, intimement reliés comme la lande à ses genêts et la bruyère à ses landiers...
Et puis, ce nid de verte mousse, et, en son mitan, le rire bleu profond de ta fleur d'ancolie...
Art, Nature, Sensualité, Jouissance et Spiritualité comme racine, feuille écorce et aubier d'un arbre dont la seule volonté et de s'élever vers toujours plus de lumière...
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Les parmélies exposent leurs auréoles flammées...
Les buses niches dans l'abrupt des falaises...
Les martinets frôlent la corniche de pierres rousses et blanches happant au passage le moindre insecte qui s'y aventure...
Partout sur le chemin, pimpantes, mais assez discrètes, sourient les violettes comme elles surent sourire à Colette qui su si bien les honorer...
Ici et là virevolte la courtise des papillons, certains ayant voilier de jaune d'or et d'orangé...
(Comment refuser un baiser à de si fauves couleurs ?)
Rocailles et pierrailles dispersées parmi les nuances vertes des yeuses et des buis, toute cette vêture de verdure dont le printemps se drape de la tête aux pieds...
Et moi de visiter ta maison de chair, cave et greniers, et moi d'explorer les jardins et les vergers, une pomme d'enfance dans le creux de ma main... (Avec dans mes yeux ton doux foyer allumé.)
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Nous ne savons pas assez combien l'eau, l'arbre, la feuille, chuchotent à nos oreilles...
La terre est plus que terre, mais l'homme trop souvent moins que l'homme...
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Je ne savais pas que l'on pouvait ceindre, en ses bras, tout un pommier en fleurs.
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Puisse l'eau venir jusqu'au cœur, et le feu l'embrasser...
Quand l'herbe se fait rosée, la pensée sa fait lumière...
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Les vieux châtaigniers...
Ce sont tours ruinées de l'antique royaume où la feuille impose son silence aux tumultes et aux cris...
Ce sont antiques tours appuyées aux épaules des collines, mémoire penchée, ancrée aux pentes du jour et de la nuit...
Ce sont forces et énergies, jadis élancées vers l'infini, qui s'obstinent, persistent, veillent sur l'échiquier des chênes et des buis sans rien dire du roi et de la reine, ni de l'esprit souverain qui règne ici...
Ils sont le cœur creusé, évidé, d'un ancestral domaine où le mot faisait sens, où les gestes précis, lents, réguliers, tissaient un châle pour les saisons de la femme et de l'homme...
Ils sont le don, la prodigalité, l'offert en sa somme...
Ils ont été le pain là où le pain manquait sur la table...
Ils ont allumé la chandelle des veillées et tisonné le feu où flambent les paroles...
Ils ont fait briller les yeux qui se cherchaient en d'amoureuses secondes...
Ils ont l'écaille épaisse des monstres sous-marins et des marteaux de forge qui leur servent de branches...
Le ciel, par leur faîte, entrouvert descend jusqu'à leurs racines et fait cercle de bois aux odeurs enivrantes...
Le centre est bien là, invisible au demeurant, mais c'est bien lui qui ordonne encore la croissance en cette circonférence où la vie est la loi...
« -La mort n'est qu'apparence » ;
c'est ce que l'Ancien leur disait tout bas,
aux temps où l'on prenaient encore, à bras le corps, l'écorce contre soi. »...
Comment décrire cela
comment dire de même le dénudé de ton corps
ce lent glissement de mes émois ?
Ici sont des âmes qui se complaisent hors des hauteurs !
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Il n'est point d'aigle au rocher qui porte son nom...
Il n'est plus ici de berger à pousser les troupeaux de lune et de soleil...
Le vent lui même gémit et se plaint de l'absence de sonnailles...
Qu'importe au genêt scorpion nos humaines turpitudes, il a tant à faire pour que s'en vienne sur sa branche le bourgeon !...
L'ajonc lui prépare son carnaval...
Les chênes s'habillent de lichens...
Les eaux s'écoulent, plus ou moins pressées, de se mettre du sel sur la langue...
La bergerie n'abrite plus qu'une épaisse laine d'ombres en veuvage de lumières...
Une étoile s'est perdue en cherchant en vain dans la nuit une cape de berger...
Il n'est plus de clarines aux transhumances des rêves et du sang...
Quand le mélèze se meurt, ses vertes aiguilles de sève sevrées, s'en vont rejoindre les forêts anciennes des légendes mordorées...
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J'ai su alors que derrière le halo irisé qui auréolait tout le dressé des terres se levait l'aurore de ton regard d'amour illuminé...
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En chemin d'étincelles (mica et quartz)...
Quand la lumière se fragmente en éclats de perles et ricoche sur l'antique sente aux pierres hérissées, tout s'ouvre des sentiers qui mènent à l'auberge du cœur...
C'est chemin de splendeur que l'aube déposée sur l'autel azuré où toute offrande demeure offrande de beauté...
Parfois, le soleil, tout à sa meule, broie dans la brume la farine des songes....
Toi, tu fus le four offert au pain d'amour...
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J'avais apporté la nappe blanche aux bordures brodées de roses d'églantier...
J'avais panier d'osier et linge de lin pur...
J'avais vin de coteaux entremêlés d'azur
et miche arrondie en ses flancs d'anis et de sarriette...
J'avais fromage frais encore humide de son lait printanier...
j'avais avec moi, le festin, le banquet, mais c'est sur ta robe à fleurs que nous avons mangé
plus que fruits de terre, plus que céleste verger...
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Pierre après pierre, les vieux mâts s'écroulent dans l'abîme du temps, glissent dans l'oubli comme glisse l'homme sur les éboulis du rêve et du sang...
Fleurs d'amandier ; cœur rouge, pétale blanc, comme la fleur du baiser...
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Des vieux mûriers, bras écartés, singent l'homme et ses grotesques postures quand l'ivresse a figure du plus triste du passé...
(Soudorges)
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Des domaines ruinés blanchissent au soleil ; blanchissent jusqu'à la félicité des pierres qui montent au ciel …
(Cirque du Bout du Monde)
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Avant d'atteindre les contreforts des Cévennes, nous traversons une zone de garrigues.
Au-delà de l'aspect monotone du paysage dominé par les chênes verts et les cailloutis blancs, ce territoire de rochers karstiques réserve bien des trésors et des splendeurs, pour celui qui se fraye passage entre les labiées aromatiques et les chênes kermès...
Au printemps, les cistes de Montpellier ourlent le manteau de la garrigue de milliers de boutons blancs, laquelle garrigue arbore lors, sur ses flancs, les rubans jaunes et flottant des genêts...
En pénétrant ces barrières naturelles et colorées, denses et piquantes la plupart du temps, on aurait tendance à faire demi-tour, mais ce serait se priver de la contemplation de quelques merveilles comme celles des orchidacées (ces orchidées nommées ophrys dont le cœur ressemble à des abeilles, des frelons, des bourdons, des papillons ou des araignées) ou des orchis et autres fleurs prestigieuses comme les asphodèles....
En ces lieux, où ne faisons que passer, résident des « immortelles » ; ces fleurs tenaces enchâssées de romarin, de lavande, de thym, de marjolaine, de pistachier, de genévrier...
Le jardin est de joie et le verger d'amour...
La garrigue nous offre ses plus beaux atours...
Moi j'ai reçu et fleuri les tiens
J'avais mains d'aurore
sur l'arqué de ton corps
et ardeur d'orage
au ruisselé de tes seins
auxquels ma tendresse faisait corsage...
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Randonnée dans le Gard Mars 2002
Terre humide des eaux de la Déesse...
Terre retournée, éventrée par le groin fouisseur des sangliers...
Des hommes passent en ce lieu peu soucieux du dit de la mémoire ; orphelins de sèves et de racines, ils passent sans senteur ni odeur, leur cimetière en bandoulière, raclent le front des pierres, ne laissant sueur en partage...
Ainsi les hommes nouveaux voyages avec un bandeau sur le cœur...
Ici, La cascade des eaux rythme la cascade des heures ; la saison s'en va passant avec sur les lèvres une fleur fanée ou en bouton...
Bergeries sans moutons et pâtres sans bergères...
Plus de refrains pour la chanson ;
la flûte joue pour un cyprès solitaire...
Mais toujours ce vieux rêves appuyé sur le bâton de l'énigme portant large chapeau de feutre posé sur le front d'un profond mystère...
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Le mas faisait gros dos
sur l'échine du mont...
Le vent miaulait d'aise...
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Sur un versant bien exposé et sillonné de veines humides, nous avons croisé une famille d'hellébore dont les graines ingérées par l'homme conduisent à la folie. (Une autre particularité de cette plante redoutable, qui partageait, avec la mandragore, les pages sulfureuses des vieux grimoires du Moyen-Age, est de pousser « en étoile » sur la tige centrale.)...
Du sommet où nous nous trouvons, nous avons une très large vue sur les vallées et les villages encaissés ou perchés sur des pitons de roches...
Nous discernons parfaitement les hameaux avec leurs maisons étagées dont les tuiles et les murs épousent les couleurs de la terre et celles des pierriers...
A leurs pieds, les vignes étendent leur campement d'hiver...
Çà et là, brûlent des feux de vieux sarments...
Des hommes et des femmes s'affairent, répètent des gestes ancestraux ; de ceux qui mènent aux belles et profuses vendanges...
Munis d'une huile sélectionnée d'olives pressées à froid et d'un vinaigre fait « maison », nous avons fait provision en route « d'ensalada campanela » pour agrémenter le repas du soir. (Poireau sauvage, pimprenelle, mâche (ou doucette) chicorée sauvage et ciboulette.)
Des oiseaux parsèment notre pérégrination ; ce sont le plus souvent des pinsons et quelques fauvettes à tête noire...
Bien au-delà de nos humaines tribulations trois buses tourbillonnent dans l'air ascendant et chaud...
Nous sommes au cœur de la forêt de Parlatges (prononcer Parlatche) ; terme se rapportant à la parole. Ce nom viendrait du fait que l'on y emmenait des enfants sourds-muets afin qu'ils retrouvent, confrontés à l'abandon et à la peur, l'usage du langage...
En ce jour, comme tant d'autres, cette forêt nous inviterait plutôt au grand silence ; un silence ponctué de la lente mais puissante respiration de ceux et celles qui savent faire souffle avec le Souffle...
Voilà une excellente façon de faire taire nos tumultes urbains pour s'offrir, nu de cœur et de pensée, aux échanges vibratoires, à la perception sensible, à une relation « géo-poétique »d'une coulée d'instants embaumés de senteurs...
En occitan, la forêt de chênes verts se dit « rovièira » (le chêne vert est aussi appelé yeuse).
Celle de chênes blancs est nommée "l'eusiéira."...
Dans la garrigua on peut rencontrer le plus gros escargot d'Europe : le zonit et, aux flancs des Cévennes, l'immense toile d'araignée de la salsepareille, crochant chaque branche pour monter à l'assaut du ciel...
Terres rouges et pierres blanches se partagent l'immense territoire autour de Soubèse...
Des taureaux dominent le paysage...
L'orage sort parfois de la fureur de leurs naseaux...
Sur la sente aux lourdes poussières, on rencontre des pierres trouées dont les « yeux » parfaitement ronds semblent vous fixer et vous interpeller sur la nature de votre passage.
En fait elles observent, depuis la nuit des temps, l'immaculée carte du ciel et ne semblent point troublées, en leur fidèle contemplation, par les pas des sabots, des cuirs, des fers ou des semelles...
Que de villages perchés où le clocher (une sorte d'oeil de cyclope) maintien ouvertes ses paupières afin de veiller sur un pays où tout se fait géant...
Tout ici s'étreint, l'eau et le feu de même...
Même les chèvrefeuilles sont amoureux...
Je suis sorti éclairé, doué de transparence, des brouillards nappés de l'Amour, guidé d'un doigté sûr me frayant passage entre aveuglement et éblouissement...
De l'amour, je ne savais que peu ; quelques contours !
Me fut offert un chant de source qui fit de ma course une rencontre destinée...
Ma gratitude s'adresse à la résidence du ciel ; là où s'en est allée la toute belle ; la saison aimée, aux danses d'hirondelles...
C'est le matin qui depuis dégrafe ta robe de lavande et de miel, ô aimée....
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