Les dits du corbeau noir

HOMMAGE A JEAN GIONO (SUITE 3) 2018 BRAN DU 24 08 AOUT

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Dessin de René Favreau

 

 

 

 

Hommage à Jean GIONO (suite 3)

Bran du Août 2018



Parmi les territoires de l'être, je vous propose de découvrir celui de Jean Giono ; l'aède, le scalde, le barde, le félibrige, le chantre cosmique de la Provence et de l'Arbre de Lumière...



Giono nous a dit "aimer, c'est joindre". Par tous les mots de son grand troupeau de lettres, dans l'assemblée noire et blanche de ses écritures, par toute la force jointive de ses minérales et végétales pensées, il a tenté "d'aimer l'homme", celui qui est en demeure de "renaître" au sein d'essentialités enfin recouvrées...



Il sera donc à la recherche et à l'écoute des prémices de cet homme "à-venir". Il en découvrira quelques uns, élus des déesses et des dieux, qui parleront et, sur leurs lèvres, il verra naître en effet les chants de "Bouche d'Or" répondant aux "Chants du Monde"...



Ce sera lors la "Fête", la "Liesse", Celles "du bon vouloir" car "tout s'ouvre et pénètre tout" "par cette argile d'homme douée de parole, par son argile muette, par sa main enracinée d'arbres"

Se retrouver avec eux "pour établir la joie"...

Il va tout d'abord pénétrer la Nature, être surtout pénétrer par Elle et par Elle aller jusqu'au tréfonds de l'être en devenir...



"Il n'y a pas que la vie des sèves, mais tout çà, si chaud de vie qu'on sentait la féroce brûlure rien qu'à toucher le tigeon léger d'un chèvrefeuille."



"Je descend dans le bouillonnement des arbres." "Je venais d'avoir la main de l'eau toute entière en caresse sur moi." "L'océan du ciel roulait au-dessus de nous la vie paisible de ses vagues."



"On était là, dans son fond, dans cette grande saumure de vie totale, aux sources mêmes de la vérité, dans cette épaisse boue de vie qu'est le mélange des hommes, des bêtes, des arbres et de la pierre...

Sous la paume de ma main je sentais battre les pulsations lentes du granit, j'entendais les charrois des ruisseaux de sève.

Mon sang battait à coups sourds dans ma tête et, venues des confins du ciel, des forces froides et chaudes passaient contre mes joues comme des jets de pierre."



"Tout descendait dans le ventre, tout y faisait de la chaleur et du poids, tout s'y changeait en sucs et en effluves, si bien qu'on était à la fin ivre de la triple force du ciel, de la terre et de la vérité." "le chant des trois vies"...



"Ce qui se passe derrière les cloisons de la terre, ça me fait peur, ça me tire, ça me suce, ça me boit. »..



« L'homme donnait une voix à la joie et à la tristesse du monde. »

« J'ai pris mon bâton de colline... Ce geste seul était sorcier, c'était un geste-maître... Le vent me prit par les épaules comme une voile de barque et je partis en navigation... »



« Ne pas rester là sans savoir quoi souffler comme esprit »

« Retrouver la maison de l'initié qui écoute la parole des nuages et lit la grande aventure des étoiles »

« Celui qui nous dire : tous tes gestes, fais-les justes. Sois l'équilibre, laisse-toi porter, fais-toi mou, laisse-toi vivre de la vie sans penser que tu joues de la flûte, et alors tu joueras. »



« Je me vidais comme une bonne fontaine se purge de son eau noire. » « J'en appelais à « l'eau vive ».

« Cette grande de boule du monde, il me fallait l'enjamber de l'écart de mes jambes, il me fallait aller vers cette belle fontaine qui racontait par trois bouches à la fois. Là, j'écoutais les pas des grands dieux. »

 

 

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A l'écoute du berger « j'ai compris que chacun de ces mots voulait dire deux choses ; une chose qu'on apprenait tout de suite, une autre chose que l'on comprenait avec le temps, tout doucement. »

Il y a des chances quand l'expérience de l'homme s'ajoute à sa réflexion, que le deuxième sens s'allume comme une lampe.

Il y a des forces du monde ; voilà le secret ! »

« La trace du chemin, ; les étoiles, paraît-il, le marquaient.

« Tu vois, disait-il, on va passer entre celle-ci et celle-là »

Je me rappelle l'odeur de l'aube « un parfum de terre éveillée et d'arbres qui reprennent leur vie. »



« J'avais faim de cette grande chose d'esprit », je voulais assister au grand drame de la terre que les chefs des bêtes jouent tous les ans, la nuit de la St Jean sur le versant sauvage qui tombe vers Saint Michel. C'était la grande nuit. Toutes les étoiles étaient descendues sur la terre et c'étaient les yeux des moutons éclairés par les feux de garde. C'était par les quatre feux du jeu, par tous les feux de la Saint-Jean que le pays allumait depuis ici jusqu'aux plus lointaines montagnes « sur la crête des collines on essayait les harpes éoliennes 'des cordes de chanvre plus ou moins épaisses tendues entre deux troncs d'arbre), on se donnait le « téou » ; le mot de paix qui se chanta dans toute l'étendue. Quatre grands feux éclairaient et délimitaient la large scène d'herbe et de terre.

En plein milieu, il y avait un homme debout. Un « mangeur de visions ». Il attendait le flux de son cœur.

 

«  -Je me souviens : les mondes, dit l'homme étaient dans le filet de dieu comme des thons dans la madrague »

On devait entendre le récitant jusque sur les autres bords de la terre et du ciel. »

C'était lui, « l'accoucheur d'images ».

Ils sont tous là, autour de lui, lourdement engrossés de rêves, du beau tortillon du serpent des étoiles et lui, au milieu, il est l'accoucheur du jeu.

Celui-là dira ce qu'il a appris de l'an neuf, parlera de ses expériences sur le large dos du monde.

Dans le « large rond d'ombre », un berger se lèvera, plein du grand débord et qu'on appellera : « la mer », le « fleuve » ou le « bois ».

Par cette grande voix l'esprit est aussitôt saisi par la noble tristesse et le souvenir des hauts lieux.

« Tout ici est religion ; voilà, dans l'herbe écrasée, la litière des dieux ! »

Tout est donc prêt sur cette haute avancée de la terre pour servir d'autel et de pierre de sacrifice. » là, près des sept belles sources. »

 

 

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« La nuit est venue.. Ils ont allumé le feu. Il n'y a que la nuit pleine d'étoiles, cette terre toute seule dans le ciel, toute bordée de ciel et, comme aux premiers temps du monde, un océan de bêtes autour de quelques hommes.

« Celui-là va raconter parce qu'il à un cœur tout en reflets où bouge l'âme du monde. »

« Dans tous ces bergers, l'âme de l'univers est comme un rayon de soleil dans l'eau. » Tous font cercle dans « une aire avec à chaque angle un feu qui danse » (un feu fait avec des ramées de pins, de cèdres et des fagots de thym sec.)

« Là s’élèvera une chanson de grande source. »

Chaque berger pressenti par le jeu prends son rang d'éléments.

Ils appelleront le Bois, le Fleuve, la Mer et on ne pourra plus désormais les appeler autrement que du nom de ce qu'ils sont. »



« A la fin du jeu, il y a toute une guirlande de grands hommes de bure se tenant par la main. »

Au début du jeu cinq harpe sont construites pour jouer de l'arbre et du vent.

Ces cinq harpes sont travaillées par cinq bergers commandés par un sixième. Des flûtes à neuf tuyaux accompagneront aussi le rythme de la cérémonie.

Les flûtes se mettent à jouer le bruit d'un d'un homme qui marche dans la mer.

Vient le récitant-terre : écoutez bergers le dieu s'en allait parce que le commencement était fini. La terre est accroupie dans le ventre du ciel comme un enfant dans sa mère.

Elle entend la vie, tout autour qui ronfle comme un feu.

Une artère rouge entre comme un serpent dans sa poitrine.

Elle s'épaissit, plus elle est épaisse, plus elle a de la lumière... Enfin elle pèse contre le portail ; elle veut naître ; elle est lourde de la raison de sa semence. Tout d'un coup, elle naît dans un jet de feu et elle s'envole. C'est la jeunesse de la Terre !

Elle roule dans l'univers comme dans de l'herbe ? Elle est toute mouillée par de grandes eaux fleuries. Elle fume de sueur comme un cheval qui a galopé au soleil. Elle traîne derrière elle une belle odeur de lait. Il y a des couleurs qui coulent en rond autour d'elle comme des arc-en-ciels... C'est la jeunesse de la Terre ! C'est le Grand Dimanche !



Et le récitant de lever ses mains en forme de salut.

 

 

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La Terre : L'essaim des étés à bu presque toute la belle épaisseur de l'eau.

Alors j'ai vu le dos du grand serpent...



Qui peut savoir jusqu'où le dieu a pensé ma vie ?

Qui peut connaître à l'avance toutes les formes prêtes dans l'ombre et qui ne sont encore que de l'air ?



Cette course, elle était inscrite dans les étoiles.



Alors je me suis réjouis avec les fruits.



L'univers est un globe de reflets.



Le Fleuve :

Nous avons des chemins qui sont écrits depuis toujours dans l'écriture des étoiles...

Ecoute ce qui es la loi et le bel équilibre (Ce jeu s'appelle la naissance de la jeunesse de la terre).



Les enfants de la Mère, dans leurs mains épaisses, portent le fruit du feu.

Il a vu l'intérieur de l'homme comme un ciel plein de forces

Les neuf bergers qui ont été la Mer, la Montagne, le Fleuve, l'Arbre, le Vent, l'Herbe, la Pluie, le Froid, la Bête et le récitant : la Terre) sont les acteurs de cette genèse.

Le récitant fait trois pas, il se dégage du du demi cercle des éléments. Lentement il s'agenouille ; il se couche à plat ventre sur la terre. Il embrasse la terre de ses bras écartés. On l'entend qui dit : Terre, ! Terre ! Nous sommes là, nous les chefs des bêtes : Nous sommes là, nous les hommes premiers ! Il y en a qui ont conservé la pureté du cœur ? Nous sommes là. Tu sens notre poids ? Tu sens que nous pensons plus que les autres. Ils sont là les hommes qui voient des deux côtés de l'arbre et l'intérieur de la pierre ; ceux qui marchent dans la pensée de la bête...

Ils sont là ceux qui ont sauté la barrière... baignés du bain de la vie.

Et l'un d'entre eux dira « moi, tout à l'heure, j'ai vu là-haut au milieu de la nuit un grand serpent d'étoiles. »

Il suffit d'imaginer.



Il es venu le silence. Le récitant est sans parole, là-bas entre les feux. Il vient de dire les mots qui doivent faire naître l'homme.

 

 

 

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Homme écoute cette grande chanson de tout le créé, de tout ce qui t'entoure. Si tu marches, tout marche à côté de toi et ta route est suivie par des troupeaux de collines ondulant de l'échine, secouant leurs sources comme des clochettes, frottant l'épaisse laine de leur bois entre tes pas.



Homme.... Si seulement tu comprenais ta grande liberté !

Et tu te verrouilles comme l'argile et tu cherches le bonheur en toi.

Ouvre-toi ! Te voilà traversé par les soleils et les nuages ; te voilà parcouru de vents. Ecoute le beau vent qui danse sur ton sang comme sur les lacs de montagne. Ecoute s'il te fait sonner du beau son de la profondeur !



Te voilà hérissé de soleil, libre de marcher dans les épines, et les épines cassent sous ton talon, et la ^rte bourdonne comme un nid de guêpes. Te voilà tout léger de nuages, et tu fais des bonds dans le ciel, et tu sautes à travers les belles vagues du ciel comme un aigle.

Ouvre-toi !

Obéis à la loi des arbres et des bêtes. Durcis ton front ; fais face avec un front de bélier.

Ouvre-toi !

Les près les plus hauts entreront en toi avec les couleurs et les odeurs. La source d'eau vient de s'ouvrir. Elle coule sur ton cœur comme sur une pierre de la forêt, et chaque goutte est comme un coup sur un tambour, et tout sonne dans toi, et tout résonne dans toi et elle va polir ton cœur dans la juste forme des cœurs, et c'est un fruit vivant que tu vas maintenant porter dans ta poitrine, et le jus de ce fruit viendra sur tes lèvres, et d'entre tes lèvres coulera une source où l'on viendra boire.

Ouvre-toi !

Ouvre-toi !

Le bonheur et la joie sont là qui veulent entrer.

Alors, chante la gloire d'être nu, chante l'orgueil d'être nu, Bélier qui marche devant le grand troupeau !



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24/08/2018
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