Les dits du corbeau noir

EN ROUTE VERS LE NORD (4) SUIVI DU CHANT DES RUNES ET D'ALFÔDUR (BRAN DU) 27 04 AVRIL

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Marqueterie de Nicole EUDE

 

 

 

 

En route vers le Nord... (4)

 

«Les « Forces » nous proposent d'animer notre voyage initiatique à la rencontre de l'essence même de notre existence et de notre expérience terrestre : l'incarnation.

Nous nous devons de les remercier pour cela. »

 

Arnaud TORTEL : Les Amoureux du Pôle.

 

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« Je plonge dans l'été des bleuets, j'attache l'odorante bruyère à mes cheveux.

J'oublie tous mes ennuis et m'achemine vers les enivrantes prairies.

Je me fonds dans les fleurs, un instant seulement.

Et je vient te retrouver comme la rosée du matin. »

 

Chant N° 5 (7 chants de la Toundra de Markku Lehmuskallio et Anastasia Lapsui

 

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Poème blanc sur blanc... Bran du

 

Blanc sur blanc...

Ici, pour ligne d'horizon, surgit le trait noir des mélèzes surligant l'espace concédé au vivant, à tout cela qui s'agite avec des plumes, du cuir, de la sève et du sang...

 

Blanc sur blanc...

La terre des Nenets, le royaume éblouissant de la lumière souveraine... 

 

Ici, s'étend le règne de la Mère-Cygne et de ses sept suivants...
Ici, l’œuf fécondé d'un monde étincelant où le soleil arrime ses songes au bois flottant des rennes...

 

Pourquoi écrire puisque fondent les glaces, puisque les rennes broutent l'alphabet du printemps ?

 

Les mots s'envolent, mais ne reviennent pas, comme les oies cendrées, au berceau de la Parole ?...

 

La chaleur, l'énergie, c'est pour l'effort, pour l'ouvrage rudement accompli aussi fait-on l'économie des coups de sang...

 

Sous le couvert tendu des peaux respire les autres peaux enfin détendues sur lesquelles résonnent les dits, les récits, les épopées et complaintes de jadis...

 

Convois de traîneaux alignés les uns derrière les autres suivant la piste tracée par « Celui qui sait » ; lequel trace en pointillés l'opiniâtre phrase d'une vie qui, certes, glisse vers la mort, mais qui ne veut s'effacer tout à fait...

 

Quelques vieux encore, à verser sur le sol, de l'alcool à la mémoire imposée de Lénine ; ce dieu « assoiffé de sang et de larmes »... Quelques vieux « bons enfants » embastillés toutefois pour délit de protocole !...

 

Cent, mille bêtes... C'est à cela que se compte la fortune, que l'on promet le soleil à la lune et la fille au gars... Selon la coutume ; celle qui est très agile de ses doigts et qui sait broder le jour avec la nuit, l'aube avec le crépuscule, le chagrin avec la joie ; celle là épousera un éleveur qui fera s'ébrouer, dans le matin, le plus de sabots et de bois...

 

Ici le silence partage son domaine avec celui du vent, aussi, les chiens, noirs le plus souvent, déchirent-ils de leurs crocs et de leurs cris cette trop longue régence...

 

La Toundra... C'est... comment mieux dire que l'immense, la neige, les glaces, le vent, le froid ?...

C'est cela qui donne de la consistance à la chair et au sang...

 

Sacrifier ; c'est partager équitablement la part qui revient au divin et celle qui est destinée aux créatures ; c'est dire cette même « Nature » qui fait respirer tout le vivant...

C'est faire circuler entre la terre et le ciel, la coupe d'entendement pour concélébrer par les libations les noces du cœur de l'Âme et de l'Esprit...

 

NOTES :

(Les Nenets sont environ 35 000. Ce peuple est celui qui a le mieux resisté à la destruction par les Russes de leur culture ; destruction des lieux sacrés, élimination des chamans, scolarisation forcée des enfants, enrôlement dans l'armée soviétique, collectivisation (kolkozes et Soukoses.)...

Malgré ce « génocide socio-culturel », ils ont pu préserver leur tradition et ainsi, leur cohésion

 

 

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Chants des peuples de la Kolyma (Nord du Cercle arctique)

 

 

« Quand ma femme m'attend dans la jaranga, j'arrive chez elle avec ma chanson. »...

Jaranga : tente en peaux de rennes

 

« Allons au dehors, les enfants.

Regardons l'aurore boréale, ses belles couleurs.

Allons au dehors, les enfants, regardons les étoiles...

Allons au dehors, les enfants, regardons la terre qui est recouverte par la neige blanche.

Elle est si belle notre Toundra. »...

 

« Au printemps, les oies arrivent de loin.

Elles descendent sur la terre, sans neige, afin de se nourrir...

Alors, notre terre chante...

Quand elles sont recouvertes de plumes nouvelles, elles se rassemblent...

Alors notre terre chante. C'est très beau...

 

Allons au dehors, les enfants...

Allons danser et chanter un peu....

 

« Ma terre, ici, l'hiver est froid.

Mais, malgré le froid, les végétaux poussent...

ma vie est à son terme...

Mais, ma terre est restée comme au temps de ma jeunesse...

Elle est bonne et généreuse.... Elle nous donne tout... Et maintenant encore, elle ne nous oublie pas...

Quand je mourrai, cette chanson restera dans le cœur des gens. »...

 

«Les jeunes filles ne passent pas.

Seules passent les grues et les oies...

Chante cette chanson pour ta bien aimée...

Il me semble qu'elle est ici. Elle entendra ta voix. Elle te reconnaîtra et elle sortira de la forêt. »

 

Je chante. Je vous offre cette chanson car je n'ai rien d'autre à vous offrir...

Je me souviens de ma jeunesse ; elle est passée...

La vie va son train. Je suis déjà vieux, mais la vie continue.

Quand j'étais jeune, je dansais, je jouais, je chantais...

Les années ont passées. Il ne me reste que les souvenirs. »...

 

Extraits du CD Chants du Monde « Kolyma » : chants de nature et d'animaux.

 

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« La vraie sagesse ne se rencontre que loin des hommes, dans de vastes solitudes. Elle ne peut être atteinte que par les souffrances et les privations. La souffrance est la seule chose qui révèle à un homme ce qui est caché aux autre. »

Igjugarjuk chaman esquimau

 

« Le monde ne nous a pas été donné par nos ancêtres ; ce sont nos enfants qui nous le prêtent. » Pensée amérindienne

 

« … La nature nous renvoie à la vie véritable, celle qui pousse à sentir, à apprendre, à réfléchir et finalement à aimer...

Nous visons tous nos propres expériences en fonction de nos choix conscients ou inconscients. Et, dans un même temps, nous ne faisons qu'un, tous reliés à la même source...

La foi est cette force sacrée qui met l'aveugle en route vers la lumière. Ce point considéré comme le bout du monde en est, en fait, le centre. C'est vers lui que je vais et c'est en lui que je découvrirai certainement le mien. »

Arnaud Tortel les Amoureux du Pôle

 

« Nous visons dans la neige. Nous savons ce que c'est le froid. Nous avons appris à le vaincre. Comment ? En lui opposant sans cesse l'allégresse du cœur. »

 

Un chaman Inuit

 

« A chaque peuple sa musique ; celle que son âme peut entendre, celle qui lui ouvre un espace libre pour sa méditation...

C'est la musique qui, faisant percevoir à notre sensibilité la réalité d'autres mondes, ceux de l'invisible, rassemble les hommes épris de sacré. »

« La Nature est le temple de l'avenir et la musique, sa religion la plus noble parce qu'elle est universelle. »

 

Jean Malaurie L'Appel du Nord

 

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Le Chant des Runes Bran du

 

« Je peins les runes qui viennent des dieux.»

Pierre de Nobely (Suède fin du VIè siècle)

 

« Quel corbeau voyagera pour moi jusqu'au pays où rient les Runes, les énigmes – une tête de géant douce aux plantes - 

Jean Claude Renard Récit 5 (extrait)

 

Par la vertu de l'If et par celle du Tremble,

Par la Bruyère, le Genêt et le Sapin,

Par le Prunier sauvage et le Sureau,

Par le Lierre, la Ronce et le Roseau,

Pat le Pommier, le Coudrier et le Chêne,

Par l'Aubépine est le Frêne des plaines,

Par le Frêne des montagnes et par l'Aulne

Par le Saule et l'écorce du Bouleau,

Par la Vie naissant de la rencontre de la Glace et du feu,

Par le Centre du Cercle et enfante les mondes,

Par ce pays de fontaines et de brouillards

Et celui des geysers et des laves...

 

Naquit la race des Géants, nourrie du lait divin...

 

Odin et ses frères luttèrent contre la Force démesurée et, abreuvés au même lait sacré, fortifièrent Terres et Mers ; confortèrent les Montagnes, les Arbres, les Rochers ; firent de leurs corps une voûte étoilée...

 

Ainsi fut renforcée l'ossature de l'Univers qui trouva Force, Rythme et Beauté pour des milliards d'années...

 

C'est là ce que comptent les Tablettes du Passé...

C'est de Celles-ci que furent gravés les bâtons sur lesquels s’appuient la Grande Marche de l'Univers...

 

Cet en l'envers des mondes que la forme de leur essence fût donnée à Odin neuf jours et neuf nuits déroulés...

 

A Odin roi borgne en son royaume inversé ; à Odin pendu dessous la branche de Chêne ; peau contre écorce, sang contre sève ; sève et sang pactisant en l'alliance suprême...

 

Yggdrasil livra au Dieu les mystère caché qui prit le nom de Rune pour l'Eternité...

 

Depuis lors, par le bois incisé de l'If ou du Bouleau où sur l'arrête entaillée de la Pierre des Victoires qui fût aussi celle du tombeau,

jaillirent les Forces maîtrisées... Feu de source, source de feu ; eau de mort, eau de vie, larme de rosée et écume des sages, lave et flambeau, ondes et flux ; forces de la vieillesse et forces du berceau...

 

La Rune n'a qu'une cible ; elle est l'arc, la flèche et l'archer, elle seule sait la trajectoire et ce qu'elle se doit de traverser...

 

La Rune, habilement et savamment tracée, pénètre, affouille, renverse, écarte et sonde, vibre en sa fréquence d'entendement, atteint le cœur de cible et celui-ci s'ébranle et fait mouvoir la roue des saisons et des âges...

 

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Alfödur Bran du

 

 

Alfödur, je chante tes mille noms,
Père de l’Énergie vitale, de la suprême Force,

(Appelée Mattr au Conseil des Anciens)...

 

Je pose mon Cercle en transparence sur le Tien...

Je confie mes ailes au reposé de ta présence...

 

Donne-moi à boire de ce rêve qui serpente entre aubier et écorce,

offre-moi la sève neuve du bouleau, verse en la corne de mes songes la douce lave par où se répand ta claire Lumière...

 

Toi, le Régent du Nord, le Maître de la Table d'Or, apaise, veux-tu, mes douleurs et mes craintes, refoule en leur frontière l'armée de ces ombres qui prétendent au divin royaume...

 

J'ai passé l'anneau du serment au poignet de ma volonté et de mon juste désir. J'ai convoqué flammes et fleuves aux noces de mes vœux afin que soient déposées les vagues de rosée sur mes anciennes blessures...

 

Je bois à pleine coupe ton miel de silence et me repais de la danse profonde qui ensommeille les rouges plaies du cœur...

 

Maître du festin, toi qui allume les sept feux et fait jaillir les sept sources, taille dans ma chair les signes secrets de tes voyages...

 

Aurais-je droit, O noble Serviteur de Vie, à la table dressée dans le pourpre écorché des matins de brume ?

Aurais-je ma part, sans cesse renouvelée, au banquet du Sanglier de Valhöll ?

 

Je fais, O noble Echanson et Maître de tout commencement et de toute fin, offrande de ces mots. Puisses-tu les consacrer et les nommer océan et rivière, os et ramures, corne et chaudron...

 

Que cela passe du dragon à l'aigle et du cerf à l'écureuil...

Que cela soit souffle dans le Souffle...

Que la Déesse tresse, au doigt de l'amour, les 7 cordes de ma lyre

afin que soit l'accord et la concorde...

 

Alors je sèmerai le blé au sang des terres pour qu'un sourire de Mère parachève la grande clameur de l'été...

 

Les annales sont silencieuses sur Celui-là qui fit don d'un manteau bleu à cet Homme, à ce Dieu, accroché neuf nuits aux branches étoilées...

 

Le « Sac à paroles » reste muet aux énoncés de son œuvre...

Quelqu'un à la main de glace, aux lèvres de gel, aiguise une faux alors qu'un autre excite la morsure de l'acier et du fer sur la chair de vie...

Le monde, sans fondement, sans assise, sans équilibre ni harmonie, bascule à l'horizontal...

 

Toutefois, le Verbe demeure dessus la Forge, rude, usé et clouté est son tablier de cuir...

 

Il faut attendre, une autre respiration, une autre inspiration...

C'est ce qu'à dit le Souffle !...

 

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« Le corps agrandi attend un supplément d'âme. »

Henri Bergson

 

« De plus en plus, on mure l'interface avec le Nord de soi-même...

Je suis bientôt rejoint par une vision d'amour, par le flottement d'un autre monde...

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J'étais homme pour le goéland ; je deviens animal devant les hommes...

Etre intermédiaire ; j'ai voulu voir le regard des bêtes sans perdre tout de la faculté d'écrire...

Le langage des oiseaux tend vers le silence des esprits ; vers un souffle de contemplation.

Lorsque l'écriture me vient, c'est comme à distance, une fois close la fenêtre sur le paysage de pierre.

Alors les traits essentiels apparaissent, le découragement s'évade, la réalité se retire et, sur le limon, les mots surgissent. »

 

Alexis Gloaguen Petit Nord Ed Terre Neuve Ode au Vivant extrait

 

 

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27/04/2018
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