Les dits du corbeau noir

Echos et résonnances autour et avec Nadine DUPEUX (II)

Nadine DUPEUX  « LOZERE »  St Laurent de Trève ( carnet de voyage et de séjour)
(Exploration ponctuée de citations extraites des œuvres de l’ami Kenneth WHITE)

« Le même fleuve de vie qui court à travers mes veines nuit et jour court à travers le monde et danse en pulsations rythmées… Et je m’enorgueillis, car le grand battement de la vie des âges, c’est dans mon sang qu’il danse en ce moment… »
Rabindranah TAGORE  (Gitarjali)

Extraits :

« …/… Un rêve de gosse : se nourrir de la forêt, loger dans ses replis et parler avec les plantes.  …/…  Se nourrir de myrtilles et de fraises sauvages, parler avec les éléments et entrer dans la confidence des rochers…  …/…

…/… Je suis une grande collectionneuse des éclats du monde…

…/… Tout concourt en puissance, finalement, vers l’union et l’extase !…

…/… Quitter le ton de la confidence pour toucher l’être dans son entier… Des pieds à la tête m’inscrire dans le monde.   …/…
M’accorder à moi-même cette affirmation tranquille  …/… Accepter le « Don d’Audace »…

…/… Décrire la périphérie pour mieux cerner le centre ; se permettre des promenades, des digressions, des citations, des évocations…  …/…
Etre acteur sous le vent, dans la lumière du jour…
On n’a de repères dans le monde que si l’on identifie son contenu…
…/… J’aimerai être de cette force qui émerge et se forge sur terre et sur l’air une si magistrale demeure…

…/… Quand l’être ne doute pas, qu’il se sait là empoigné par la vie et sommé de la maintenir, qui, à son tour, somme la vie de le traverser à plein courant, à pleins poumons, à plein cœur, à plein sang. Cette puissance d’être impose à tous, autour de soi, d’être aussi profondément, aussi assurément. Elle dénombre et elle retient. Tout ce qu’elle capte est nourriture. Sa foi la préserve….                                                                                    Je voudrais être cet élan sans faille, cette avancée sans condition…

(Défi à la perception que nous avons de notre propre identité.)

…/… Que le périphérique se laisse dissoudre par le centre, enfin…

Les prairies…  magnifiques, ondulantes, qui invitent à s’alléger de soi sous la coupole du ciel. Elles sont l’antidote du mensonge, à la peur, un rempart contre la violence. Mâne de consolation, Grandes Pourvoyeuses d’Oubli…

…/… Vert émeraude des grandes forêts, des vols rêvés vers des ailleurs de l’être que nous ne savons pas atteindre… des portes vers le Grand Tout nourricier…

…/… Le monde n’est que par notre corps. Il est le cadre qui retient, l’aire qui permet l’envol. Son alchimie ne peut nous être connue…

…/… Il importe d’affiner la perception que nous avons de son empreinte, pour en capter les échos, les bribes, les signaux    (Il s’agit du « pays réservé ») …/…

…/… Je suis chez moi, partout dans le monde ; je suis construite de la mémoire des montagnes et des herbes, des flaques et des abbayes. Tout porte témoignage …/…
Errer, collecter, recomposer ; ce puzzle de la conscience enfin, qui m’interroge et demande que je lui porte attention, recueillement, travail (ouvrage)…

…………

Repassant sur le chemin parcouru, découvert de Nadine, j’ai ramassé quelques mots comme des jalons apostrophant le passeur, comme des « curiosités » propres à interpeller sens et regards…

Invaginé / l’imbécilide / les « herbes sonnantes » / les eaux mariales / la calligraphie des racines / la reptation et reptilisation / le tressé, l’effiloché / …/…

Je pose cela sur l’étagère près de la fenêtre avec d’autres collectages qui se suffisent à eux-mêmes ou qui attendent la conjoncture d’un poème associant leur forme, leur couleur, leur texture, leur origine, leur devenir, avec leur propension à résister ou à se dissoudre en cela…

La pensée saisit d’abord ce que les yeux ont vus, les sens ont perçus, ce que la main empoigne… le lien se fait… le mot enfante le mot… L’espace se comble, le vide s’élargit… l’instant se veut plénitude, comblement, pénétration, enfantement….

La douleur, c’est la sédentarisation… C’est-ce mouvement qui ne peut se déployer dans l’immense ( océan de feuilles ou d’écumes, d’herbes rases ou de sable…)

L’extérieur à soi… C’est pour cela que l’on a inventé plus spécifiquement le carnet de route, le crayon, le pinceau, ou l’appareil photographique… C’est pour cela que les marcheurs louangent la marche, en font l’éloge pas à pas…

L’homme qui marche entre les herbes et les pierres, les buissons et les rus, prend feu d’air et de lumière…

Devant ; ce ne sont que secrets à découvrir… Ce sont lieux et étapes de recouvrance, de revêtement, après le dénouement, l’acceptation, l’abandon, l’offrande qu’ils impliquent….

Mettre la vie en mouvement, c’est déboucher le bassin encombré d’automne et d’hiver et lui rendre ses écoulements premiers …    Obstrué ; nous sommes obstrués jusqu’à la gorge, jusqu’au rêve !…

Le sec appelle l’humide, la rigidité, la « ployance »… La garrigue vêtue de ses buis, les Causses de leurs lavognes et bories, de leurs massifs de chèvrefeuilles, de leurs pierres éclatantes et éclatées de blancheur… Invitent elles aussi à plonger dans les gorges fluidiques de l’amour…

Thoreau se disait « arpenteur des tempêtes » … Je me veux héritier de cela, de cet arpentage de l’essentiel, de l’élémentaire, de l’immédiat, du fondamental….

La pierre m’importe, le brin d’herbe, l’onde, les papillons, les bergeronnettes, les jeux de l’ombre sur la piste de lumière, l’écorce, le silex, l’os blanchit du jour… la plume de geai, plus spécifiquement la plume de geai !…

L’inventaire de l’enchantement, de l’émerveillement commence dans ce rapport privilégié que j’instaure seul avec le tout… Je ramasse avec les yeux des trésors dont le prix ferait écrouler toutes les bourses du monde !…

Son apothéose consiste à le refaire à deux, cet inventaire de la vie en nous, en écho, en résonance avec ce dehors qui nous emplit d’importance futile, solennelle, substantielle…



JUBILE  Nadine DUPEUX  extraits

(solennité publique célébrée tous les cinquante ans)

(L’affranchissement ponctuel, libéral, de tout ce qui est esclave, de toute spollation de l’être…)

« …/… J’aurai voulu un jubilé pour tout ce qui croît et décroît, en silence, en vaillance, porté par la volupté des lunes et des soleils, les eaux du ciel et les ardeurs malgré tout renouvelées de la terre… Un jubilé pour toutes les formes de vie. »…

Ainsi la terre à ses rituels  /  un pacte a été rompu   / restent les cicatrices (après moisson)

« L’hiver ne sait pas me défaire à chacun de ses retours des images qui me hantent, des mots qui me poursuivent, jusque dans l’écriture…  …/…
Il faudrait rendre aux tempêtes leur vraie puissance, au couchant sa véritable lumière, pouvoir s’ouvrir à l’animalité des arbres, des herbes et de la boue… Ouvrir une humanité nouvelle, une forme inusitée de connivence avec l’éclat « présent »….

Les herbes boivent leur temps de latence…/…

Il arrive aussi certains jours que le soleil se lève désenchanté et rende aux hommes leur colère…  …/…

Des envies de dissolution, d’évaporation…

J’aime ce qui s’estompe, se perd, se fond… »

………………………………………………

Dans les empreintes précitées…    Bran du   15 mars 2013

L’affranchissement périodique de nos aliénations…Décréter chaque jour « carnaval »…
Agiter le sablier de quelques sables chaotiques à souhaits !
Opérer quelques renversements hiérarchiques, retourner la face de la pièce autant tragique que grossière à laquelle nous donnons rôle et masque…

La délivrance par l’inversion… par retournement de situation mais sans le « théâtral » !
L’asservissement est à son comble et ce d’autant plus qu’il résulte d’un consentement, d’une caution, aussi paradoxale et contradictoire,  que l’on puisse imaginer au sein d’une vie, rebelle et résistante, qui est encore capable de faire abstraction de l’homme…

L’affranchissement pour la pétulance à être, pour la « jubilation » à être…

Pour mettre fin à la pauvreté de notre langage, à l’extrême usure des mots…
La nature nous offre pour cela une myriade de vocabulaires secrets, acidulés, insoupçonnés et inédits et ce en langue de pierre, de feu, d’air et d’eau, en langues anciennes, peu usitées, mais fraîches et jouvencelles comme un bouquet de myosotis bordé de cresson dans une mare limpide où le soleil prend son bain…

S’affranchir demande de franchir, de dépasser, de passer au-dessus de, par-dessus ce qui s’oppose à la liberté au nom d’une pseudo sécurité érigée en dogme incontournable, indéboulonnable… (Et garante de la maintenance de l’insupportable, de l’inacceptable)

La restitution de ce qui en nous a été amputé, castré, enseveli, cimenté, formaté, avili et défiguré….. La recouvrance suppose cette restitution des facultés et capacités à vivre la vie dans toutes ses dimensions, dans toute sa contenance, sa viduité, ses plénitudes…..

Le sevrage a bien trop duré… le temps des sèves est revenu… le sang à soif de nouveaux territoires pour épancher ses audaces, ses songes, son imaginaire, sa créativité…

Cela les mondes naturels l’ont gardé en dépôt au cas où… l’homme ferait resouvenance !

Au cas où il reprendrait en sa paume, la semence, la graine, l’amande, le noyau…pour  les planter, ému et légitimement fier, dans le terreau de son propre cœur, dans le limon de ses propres attentes, dans l’humus de ses plus justes et intimes aspirations…

Pauvre brebis que nous sommes dépourvues de lactation !

Car, nous ne savons plus traire le lait des étoiles !

Nous avons tant de scories à passer sous un filet d’eau pure…

Il est grand tant de rassembler dans la flamme l’amoncelé de nos branches mortes…

Le Verbe prodigue, prolifique, débordant, fait peur alors qu’il se veut délivrance…

C’est un vent qui cherche désespérément cette voile d’espérance hissée sur la mer…

Y-a-t-il une trève pour la bêtise et l’absurdité ? (le temps de ramasser nos cadavres, nos désirs avortés, nos enfances perforées, nos innocences abusées….)

Depuis deux millénaires combien de combats au nom de ce qui entrave la vie, l’emprisonne, l’écartèle, la soumettant sans cesse à la question qui n’a pour réponse que la barbarie, le génocide, l’exploitation du vivant sous toutes ses formes et la torture individuelle et collective, la soumission du féminin devant un masculin poéticide ?

La réconciliation ne se peut que dans l’entendement concélébré entre vivants de toutes espèces… Que dans une resacralisation des gestes et des pensées empruntant aux rituels païens le Souffle Incréé et l’Awen Inspiré… Oubliant la Loi de la lettre, nous retrouverons la Loi de Nature… l’Etre de Nature !…. L’Etre à Naître dans le berceau des possibles ; un berceau veillée par des fées revenues de nos bannissements éhontés et arrogants…

Ceux que nous aimons    Nadine DUPEUX  (Extraits )

« …/… A l’heure où l’orbe du ciel plonge sur l’isoloir du monde dans l’inaudible blanc…
Il est Absent, tout près…

Nous ne savons pas
Où se tiennent ceux que nous aimons
Des eaux troubles suivent des courants
Que l’Insoupçonné emporte, que la Vouivre conjugue.

Mon cœur tremble
C’est qu’il est saoul
De ne pouvoir boire à leur coupe.  …/…

Ils ont des rêves que nos poches ne peuvent receler… …/…

Qui murmure la paix promise,
Qui déclame la vie sous les arbres lourds de fruits ?    …/…

Les mains gorgées d’étoiles …/…

L’aube n’habite plus ce matin. Si la terre a tremblé c’est qu’une heure s’est fendue.
L’herbe elle-même a rendu son foin,
Son jus, son parfum, sa couleur.
Elle a rendu sa voix.                         …/…

C’est la vie qui rejoue
La farce du chagrin
Quand chaque nuit
À pourtant
Son matin.               …/…

Ils sont comme le vent doré
Ils vont ils viennent
Comme le sable fourmillent
Mes mains ne peuvent les retenir…



NADINE DUPEUX : « Ces Buissons Ardents »  extraits

« Dans la nature, plantes et hommes sont indissociables, leurs fonctions formant un cycle complet dont les deux parties complémentaires sont inconcevables l’une sans l’autre. »
(La feuille nous fournit l’oxygène… La plante est à la base de la chaîne alimentaire…)
Bernard HASS (Il explore et décrit les liens essentiels entre l’homme et la plante.)


« La plante, si importante pour notre survie matérielle, l’est aussi par la part symbiotique de notre être. »

« …Jamais nous ne rencontrons d’ « autre » que nous-mêmes dans la forme de conscience qui est la nôtre…
Nous autres humains avons cette particularité de concentrer en nous tous les règnes, d’en posséder des aptitudes, d’en refléter des postures, extérieures ou intérieures…

La pensée a créée la particule, c’est-à-dire la matière… mais d’où vient la pensée ?
(D’un « réservoir-source » universel qui anime toute chose appelée « Esprit non localisé » selon Deepak CHOPRA dans son livre « corps quantique »….)

La méthode dite anthroposophique (de Rudolf Steiner) (Inventeur de la théorie des signatures)… Une forme d’investigation créatrice qui lie l’intention et l’observation à la connaissance, dans un va et vient constant.

C’est sur cette méthode que se fonde mon travail. Dans une quête de rencontre profonde avec le « deva » ; l’âme génétique de la plante.
Je collecte puis je travaille avec chaque plante comme le dicte mon intuition…

« Il suffisait d’entrouvir les paupières pour voir, à travers le balancement des graminées, qu’il « faisait » Dieu autour du monde comme il fait brebis de l’agneau à naître. »                  Jean Olivier HERON (Contes du septième jour)

« Cette même vie qui jaillit joyeusement de la poussière terrestre en une multitude de brins d’herbe et éclot dans les tumultueuses vagues de fleurs. »  Tagore

Consciente de ce que la structure de mes cellules épouse celles de l’univers ; désireuse de marcher à la rencontre de moi-même vers ce lieu de l’esprit où, selon Breton, le haut et le bas cesseront d’être perçus contradictoirement ; disposant pour guide et outil, de l’intense désir de mettre au monde les formes qui m’habitent, issues d’un espace de ma conscience que je dirai sacré tant il génère de joie, mes œuvres sont des offrandes…      Et des sacrifices, puisque l’élément végétal y est prépondérant, récolté à vif et plié à mon exigence.

L’offrande porte l’idée de douceur, d’acceptation dans le don…

J’explore des espaces du dehors qui sont aussi des espaces personnels, et je suis émerveillée par la force du vivant…

Traversant les demeures de la création, il me semble entrer dans son intimité…

L’offrande est à reconnaître …/…  à mettre en évidence dans ce « déjà là » qui ne se donne qu’a qui veut s’en saisir.   Faire offrande, c’est augmenter le déjà là, le transformer , le magnifier, en l’humanisant.

Il est attendu de moi que je sache opérer ce retournement ; transmuer l’épaisseur des choses en des rais lumineux ; allumer les buissons d’épines par un regard conscient.      Et retourner à l’énergie sa lumière.

Rendre l’opaque à sa luminescence, sa transparence, sa fluidité. Rendre la chair au flux qui la génère. Déshabiller les corps de leurs écorces. Principe de l’offrande et sens du sacrifié. Par là il y a une montée libre et spontanée du chant, par l’autre amputation consentie : le dividende est reversé dans les deux cas fruit d’un effort ou d’un abandon joyeux dans la chair.

L’offrande est un acte centrifuge spontané ; il retourne en miroir vers l’extérieur la beauté captée de l’intérieur. Le meilleur est renvoyé. Le miroir est un filtre qui ne conserve pas, n’engrange pas, ne retient rien. Son mouvement est de recevoir et de retourner l’essence lumineuse des choses, leur part ardente.
Dans l’offrande je me contente de retourner à l’œuvre son image, gonflée de ma force de vie, de mon admiration, de ma liberté de femme.
Je luis relis sa lettre. Et je tente de la lui retourner augmentée de ce que je suis. »



Nadine DUPEUX   Ces Buissons ardents  (extraits)  (…de chair et de lumière…)
(Afin que la joie demeure…)   Et Le Méandre de la Vieille Rivière (extraits)

« …Tant il est vrai que le monde est en nous, tout autant que nous sommes en lui… »

« …Comme les plantes, je suis ligneuse, cellulosique, chlorophylienne, epiphyte et rampante à la fois…
Puisque je suis, moi aussi, ce buisson …

La berce : …/…  Elle a trouvé son nom et avec lui son centre, son sens…

Les nacelles : (d’engendrement, de gratitude, d’alliance…)
« Nacelles, esquifs légers et fragiles issues d’un long voyage, anneaux témoins d’anciennes alliances, couronnes revenues de guerres lasses… »

…/…Pour l’homme qui a su grandir en vigilance, la nacelle est gratitude…

(Les hommes qui ont perdu la joie et le sens de leur vie se sont perdus eux-mêmes…)

Le cancer : prolifération toxique de cellules qui n’en réfèrent plus à l’unité d’ensemble de l’organisme pour juger elles-mêmes de leur multiplication. A l’image de ce que notre génération à su générer, par nous tous qui nous pensons comme des centres.   …/…

Le tapis de noyau : …/… Voici la terre rouge, les semences en  attente du réveil. Tout se plie à la loi, et nul n’en pourra plus sortir. Les cycles ont commencé et engendré un non retour…  …/…

…/… Ainsi suis-je grain …/… En moi tout est déjà semé, tout est là prêt à advenir. Car je suis déjà quelque part, hors le temps, accomplie… …/…

…/… Tracés de forces qui s’entrecroisent pour que la vie s’incarne. …/…

(Les entrelacs vivants des chênes.) (Les motifs celtes ; figuration des énergies de vie…)

Revisiter le geste des origines…

A quel autre creuset (alchimique) pourrais-je prétendre, alors que je me tiens tremblante dans ma nudité à la porte du grand tout ? …/…

L’impossible vision murmure constamment en moi. Elle nourrit mes cellules, c’est ma plus grande force… Que j’aurai voulu conjoindre à celle d’un Autre…  …/…

… La saga magique, magnifique, de la genèse ouvre toujours en moi les gouffres impatients du désir…  …/…

La contemplation ouvre, elle est par essence pur passage… …/…

Celui qui manque depuis toujours manque toujours plus. Il y a toujours eu un vide entre le monde et moi. Je ne sais pas ce qui me manque, qui manque. Je ne sais pas pourquoi il manque. Je ne sais pas où trouver la réponse à cette question qui elle-même manque tellement  et cruellement de chair.  …/…

Me saisir du manque comme tremplin… Par les désirs qui sauvent…  …/…

Le cosmos infuse le centre du centre et au milieu mon désarroi. …/…

Tout ce qui est dehors est dedans…  Tout ce que m’évoque la rivière m’est encore et toujours que moi en mouvement.  …/…

…/… Pas de nouvelle pour le tapis de l’hiver, pas de collecte aux prémisses du blanc, pas de cour aux souffles chargés des eaux et des ombres. Au Nord pas de collecte.

Chaque mue me rapproche de l’esprit et de moi-même… les flammes de l’esprit par qui tout pulse…. …/…

…/… L’homme est essentiellement un être de métamorphose et le monde change avec lui.
…/… Nous sommes par essence des êtres en mutation…

…………………………………………

Quelques échos et résonances   Bran du  mars 2013

La manque : quelque chose qui oscille entre le vide et le plein, la béance et la complétude…  On ne peut fonder l’espoir, le désir, l’aspiration, de concélébrer les « noces d’offertoire », sur une motivation basée, fondée sur le manque ; un manque que lors nul ni personne ne peuvent remplir…

La soustraction n’est pas un vecteur ou un facteur d’addition…

Le creusement sera comblé par le déversement… quand les eaux seront prêtes, quand la source sera épurée, quand le bassin aura fait son plein de lune, de soleil, d’étoiles, quand tout ce qui attendait s’écoule, se répand, se déverse, librement et joyeusement…

Projeter son désir ; c’est faire rebondir un certain nombre de fois le galet d’impatience à la surface du temps… Au dernier ressaut s’ouvrent le profondeurs, s’évase l’engloutissement…

L’amont fêtera, fera corbeille et panier de joie, quand l’aval aura prémédité en silence
la future chorale qui fera monter haut les chœurs…

Entretenir les braises sous la cendre, à petit souffle, à petit songe… Le vent viendra, avec sa brassée d’été, d’alouettes et d’hirondelles,  bouter le feu à la gerbe tressée de sang et de chair offerte pour le « Mercy »…

Tout cela qui nous contient, nous enveloppe, nous enceint, tout cela qui vibre d’une onde originelle, tout cela qui nous tisse aux fibres du destin…

Tout, aussi bien les arméries maritimes, les  silènes, les paons du jour, les bergeronnettes,
l’armillaire couleur de miel, le sel de la mer, le fou de Bassan, la folle avoine, les herbes tremblantes, l‘araignée et le charme, le poulpe et le frêne, le merle et le marsouin…. Tout tremble et frémi comme tremble et frémi notre chair… Tout se ploie ou s’arrondi comme notre chair de même… Tout croît plus fléchi, se dresse puis se courbe… Tout sort de terre, de ciel ou de mer et y retourne…. Nous sommes totalement, pleinement, ce « Tout »…

L’arceau et le cerceau, l’arcade et la rotonde,  l’orbe et la mandorle, lauréole et l’anneau, l’allo et le disque, le collier et la couronne…. Tu es cela… Tu es l’épouse de cela ; la sphère « d’enclosement » et de germination ; le cerceau d’initiation ; la mappemonde du voyage intérieur…. L’Etre se tient en ta circonférence et l’ombre à ta périphérie…

L’alliance, l’engendrement, la gratitude…
Trois gerbes d’écume dans les marées de l’existence…
Trois notes pour dire le cristal, la pointe de diamant…
Trois saisons pour que l’hiver ait à nous dire…
Trois comptines pour bâtir une légende,
Trois vœux pour aimer à souhait…

Cela viendra des yeux, partira des yeux, au lever des paupières…
L’aurore sera là, sa rosée sur tes tempes, sur mon front…
Le bourgeon dira la fleur enclose ; lecture en sera faite par les paupières décloses…

Il y a toujours un geste premier pour nous rappeler l’algue et le lichen…

Un geste premier sorti des os !

Ce sera un mouvement en avant, un élan, un jaillissement, une reptation, un redressement…   Avec une volonté de conjonction, d’ajustement, de conjugaison…

Avec cela qui tend vers…. Parce que l’Autre se présente, réceptionne, invite et suscite, conduit et accompagne, ouvre et déverse, offre et rassasie, sacralise et nomme…

L’incarnation, la véritable se célèbre à deux quand fusionne l’Esprit…

Passage du seuil….. Ici nous est clairière… avec la bénédiction des jacinthes et des anémones…

Toute grève, tout rivage, tout granit… Les lavandes, les pavots cornus, les liserons, la salicorne, le rosier des chiens, l‘œillet, le panicaut , la criste marine, le choux marin, la giroflée des dunes, l‘oyat…. Tous attendent la marée, celle qui recouvre, celle qui submerge…
Toi de même et moi aussi…

Tout est mouvement, tout danse, densément, intensément… Nous apprendrons à parfaire…

Des patelles, des plumes, des os de seiche, des bois flottés, des grands laminaires….
Des escargots de mer, des galets parfaitement érodés et des centaines de petites pierres…
Tout cela a collecter comme font les enfants amassant et cachant leur trésor de guerre…
Collecte sera fête de l’hiver à l’été…

Nous nous rappellerons tout ce que nous avons été dans le creuset des millénaires…
De nos landes et de nos grèves, de nos halliers et de nos taillis, de nos buissons aussi, nous ferons un méticuleux et prodigue inventaire…

Je te dirai les schistes pourpres de Brocéliande, le granit rose d’Erquy, l’ardoise de Guerlédan, le quartz sur Jospinet, la rouille du temps et des métiers sur le quai de Dahouët, les filets bleus du rêve déchirés par les écueils, le pavillon noir des cormorans et l’humeur des goélands qui n’ont que bec à occuper… Tu me diras dans la rondeur des tours, la Lozère, l’autre Bretagne ; celle de l’intérieur qui fait de ces phares des clochers, le chant des grillons gardien des « trous noirs »,  ceux que tu as aimé, ceux qui t’aimeront, le servant de neige, l’ombre qui rigole, la part de l’herbe, tes œuvres exposées  (Dinan, abbaye du Léhon et du Tronchet, St Malo,  St Brieuc, Monfort sur Meu…. Et les treize lunes tressées chez nos cousins du Québec….
Et cette courbe tant épousée du l’ancien lit de la rivière…

                Au passage, j’ai fait aussi provisions de Citations :


« On le croyait péri

Au seuil est allumé une lampe
A la table est venu le pain
Car sur la route on vient d’entendre le pas d’un disparu
On le croyait dissout dans la plainte du vent
Dans la mémoire des hommes
Dans l’espérance de la nuit ;
ON LE CROYAIT PERI ;
MAIS IL SE REPOSAIT
Comme le fruit se repose dans l’ombre du verger. »           Françoise BOCQUENTIN

« Le nœud nuptial de l’être

Et voici qu’il s’avance tel un rayon d’argent qui éblouit la mer
L’heure en lui s’est levée comme un beau vent d’hiver
Il porte dans ses mains le nœud nuptial de l’être
Il marche lentement pour ne pas l’abimer. »                                    (Idem)

« Le monde est un grand rythme qui chante toujours. Et parfois le cœur s’en aperçoit. »
SATPREM  (Par le Corps de la Terre)

« Pour atteindre à l’autre visible, il faut avoir perçu le visible, il faut même l’avoir aimé. »   Yves BONNEFOY

« L’opérateur à une place dans l’expérience mais l’expérience a également une place en lui. La pierre, elle, ne se fait pas seulement dans le creuset, elle se fait au cœur de celui qui la fait. »   Patrick BURENSTEINAS  (Alchimiste)



12/04/2013
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