Les dits du corbeau noir

De l'Ecologie Profonde (Un nouveau monde en marche) extraits

Un Nouveau Monde en Marche  (Vers une société non-violente, écologique et solidaire)
Laurent Muratet et Etienne Godinot   Editions Yves Michel   (extraits)

Bernard BOISSON (photographe, écrivain et réalisateur audiovisuel) et sa compagne Claire CARRE (membre de l’Obod) ont croisé leurs regards, l’un déployant le concept de « primordialité » lié à un humanisme profond et l’autre actrice de l’écologie profonde ou du « Travail qui relie »…

« Entendre le cri de la terre en nous. » Thich Nhât Han (Moine Zen)

« L’acte politique le plus subversif est de croire en soi. »  Joanna Macy (créatrice de la deep écologie) « Puisque nous avons conscience de l’écocide qu’entraînent nos actions, pourquoi continuons-nous à agir dans la destruction ? » (idem)

« Une partie de l’humanité est convaincue que tout semble immuable et inattaquable, et elle occulte probablement une autre humanité. C’est à cete seconde partie qu’il faut s’adresser, pour essayer de la rassembler. » Pierre Rhabi (Pierre Rabhi et Nicolas Hulot)
(L’utopie peut mettre une réalité en marche.) idem

« Si l’humanité arrive à affronter lucidement le rendez-vous critique qu’elle a avec elle-même du fait du risque de sa propre disparition, elle peut ouvrir une voie qualitativement supérieure dans sa propre aventure. Le défi n’est plus d’ordre biologique, mais d’ordre politique et culturel, c’est un défi d’humanisation et non plus d’hominisation. C’est d’une façon à la fois planétaire et individuelle, l’enjeu à construire d’un véritable « désir d’humanité ». Il nous faut à présent construire les éléments positifs de ce désir qui nous feront sortir du cycle de la peur. » Patrick Viveret

« Au-delà de la prise de conscience actuelle, quels changement de valeurs et de paradigme pourrait nous permettre de cheminer vers une autre société, une autre civilisation ? »
Laurent Muratet et Etienne Godinot

« L’écologie profonde » nécessite pour exister l’avènement d’un « humanisme profond ». Bernard Boisson

Claire Carré : L’Ecologie profonde : elle est composée de quatre courants majeurs :
Recherche philosophique / Vécu expérimentiel / Vision  systémique des sciences de l’écologie/ Mouvements de résistance pour le maintien du vivant.

Arne Naess pose en 1973 une philosophie et une ethique remettant en cause la vision anthropocentrique de nos sociétés. Il souligne l’interdépendance des êtres vivants au sein des écosystèmes, l’interdépendance des écosystèmes entre eux au sein de la biospohère, il présente l’humain comme tout autant impliqué dans cette interdépendance… Il avancera le terme « d’écologie profonde » pour qualifier cela…

"Les approches de cette écologie profonde passe par le vécu, le ressenti, l’éveil de notre pleine appartenance au Vivant, par le « soi écologique, en Co-extension avec les autres êtres et la vie de notre planète. » (Arne Naess)

Il y a pour notre société un grand besoin de structures « d’accompagnement au changement »…

Comment passer du désespoir ( à la vue des constats déplorables d’une société autodestructrice) à un sentiment « d’empuissancement » pour sortir d’une forme d’anesthésie face à cela ?…

Une réponse est proposée par l’écologie profonde ou écopsycologie qui propose un travaille en groupe et dans un cercle (et en s’inspirant de la vision de Carl Gustav Jung)…

Ce travail en France se fera dans le cadre du « Travail qui relie » provoquant une « maturation du monde en soi » par le sens poétique et par des démarches analytiques…
Il puise chez Joanna Macy à 3 sources :
Les sagesses des Anciens des cultures du monde entier
Les sciences modernes (théorie des systèmes et physique contemporaine)
La peine bouleversante que nous éprouvons pour notre monde.

Joanna Macy a vu dans ces actions un processus s’apparentant au voyage intérieur d’une personne activement engagée, au service de la Terre et de l’humanité ; un voyage se présentant comme un cheminement en spirale qui mène au cœur du monde. Une spirale en 4 étapes qui passe de l’émerveillement, à la reconnaissance de la souffrance, à un nouveau regard, et à l’engagement. ( C’est là la base des ateliers du « travail qui relie » mis en place et animés par Claire et Bernard)

Les 5 principes qui sous-tendent la pratique de transformation du désespoir en « empuissancement ».
1 / Les émotions douloureuses sont naturelles et saines…
2 / Cette douleur ne devient morbide que si elle est refoulée…
3 / L’information seule ne suffit pas (s’entraîner à diggérer cette information affectivement)…
4 / Débloquer les émotions refoulées libère des énergies et clarifie l’esprit…
5 / Débloquer notre souffrance pour le monde nous relie à la « Toile de Vie »…
    (L’univers dans lequel nous vivons et en interaction à tous les niveaux et les événements sont tous reliés les uns aux autres selon Fritjof Capra)

Bernard Boisson : La dimension sauvage de la Terre est nécessaire pour que les dispositions contemplatives des êtres humains ne se dévitalisent pas, et que les êtres humains vivant cette contemplation comprennent  davantage, par le sensible, la nécessité de rendre à cette nature son droit d’exister en elle-même et pour elle-même, indépendamment de l’humanité, pour perdurer dans ses équilibres.

Il est possible que demain, nous restituions bien plus de place à la nature qu’il ne lui en est nécessaire pour ses équilibres propres, non point par exigence écologique, mais par besoin d’Infini, par envie d’ouvrir une respiration contemplative des sens, où le monde entre en nous comme nous entrons dans le monde…

De la primordialité :
« Nous ne sommes pour ainsi dire pas reliés à la nature. Nous sommes surtout reliés aux idées que nous nous en faisons. »  Etre parvenu, plus qu’à se régénérer, à se transformer en conscience à la source de nos perceptions, de sorte que nos représentations initiales de la vie s’en trouvent modifiées, voilà ce que l’on peut appeler « une transformation expérientielle de soi. »… La reliance au Vivant, à la Terre, est dans ce perceptuel. Il nous importe de l’introduire dans le liant direct entre humains… Ce qui manque à notre société, c’est de savoir vivre comme un orchestre. C’est-à-dire, d’agir plutôt par accords collectifs dans l’immédiateté des perceptions (la syntonie)  que par adhésion à des opinions trop longues à faire évoluer face à la rapidité des changements actuels.

Un recours à l’art serait nécessaire pour stimuler autrement la vitalité humaine…

Quitter la pensée anthropocentrique comme le prône l’écologie profonde pour vivre dans une conscience biocentrique ou écocentrique…

Aller vers une complétude humaine, c’est vivre une sensibilité habitée par le monde, avoir dissout à travers le sensible cette séparation entre le dehors et le dedans.

Quitter la suprématie des facultés rationnelles, logiques, analytiques, statisticiennes, méthodiques, conceptuelles, idéologiques, discursives (tous ces outils intellectuels de l’avoir et du pouvoir) qui dominent l’éveil sensitif, l’inspiration, l’intuition, l’analogie ou le discernement, le vital créatif qui furent jusque-là mis sous tutelle, quasiment maintenus en castration permanente par un système éducatif et professionnel qui n’a jamais vraiment su les estimer.

Contempler, c’est se donner le droit d’être inutile à qui que ce soit, à quoi que ce soit…
C’est par cette disposition humaine que va se jouer toute l’interface majeure entre le vital de nos sociétés et le vivant de la nature…
La contemplation expérimentée en profondeur devient le creuset existentiel de la maturation…
A travers la contemplation, nous pouvons entrer dans une respiration entre le Vital de l’humain et le Vivant de la Terre.
Ce qui nous est donné de pouvoir vivre en ce sens est bien plus que de l’éveil sensoriel, c’est de développer un sens de plus en plus fin du discernement dans notre conscience qualitative à l’égard de tout ce qui existe.


C’est avec le discernement que nous sentons dans l’immédiateté si nous sommes accordés ou désaccordés aux autres, à la nature, à la Terre, au Cosmos…
Contempler revient à s’éveiller à l’essentiel et veiller à l’essentiel au travers de  tout ce que nous pouvons recevoir en percepts de la primitivité du monde. Veiller à l’essentiel, pour que dans tous les changement que l’humanité opère dans son extension, nous ne perdions pas, à jamais, le contact avec l’indicible, l’infini, l’ailleurs, l’ambivalence, l’intemporel, l’originel, l’anonyme… tous ces signes de « primordialité » dans les espaces oubliés de la nature. Tous ces signes, quand ils convergent en notre éveil sensible, quand nous les avons reconnus, compris, estimés… deviennent tous en un le diapason de notre conduite, de nos arts de vivre…

Toute culture naît avec l’écoute, meurt avec l’oubli…

Pour retourner vers la nature, vers le vivant, le vital, il importe d’abord de savoir quitter l’expression pour revenir vers l’impression… (Ce que Claire enseigne pat ailleurs à l’égard du corps nous avons à le témoigner artistiquement à l’égard de la terre.)

Claire : la plus grande inspiration pour moi est de sentir que nous participons à une aventure que nous pouvons réellement célébrer…Si demain des descendant,  humains et autres, sont ici sur terre, ce sera parce que nous aurons relevé ce triple défi : protéger le vivant, crééer des structures nouvelles et changer de conscience. (Passage vers une conscience collective, une éco conscience, une ouverture du coeur, un sentiment d’être avec le Vivant…)

(Voir et suivre l’expérience transgénérationnelle de la résilience locale des Villes en Transition…)

J’ai plus que jamais le sentiment profond que nous sommes la Terre qui fait une expérience temporelle d’elle-même, à travers l’humanité.

Voir aussi : Bernard Boisson Nature Primordiale des forêts sauvages au secours de l’homme.
www.natureprimordiale.org et Claire Carré www.roseaux-dansants.org



12/10/2012
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