COLLOQUE BRETAGNE CELTIQUE (EXTRAITS) F REGNIER ET B CUNLIFF 2023 20 08 AOUT
Bretagne Celtique ! Colloque Extraits
Colloque dans le cadre du F.I.L. Festival Interceltique de Lorient... (900 000 milles visiteurs pendant 9 jours)
Dans l'ordre de Parution :
Notes Bran Du
Fabien Régnier
Barry Cunliff
Corine Poulain
Rozenn Minin
Notes conclusives Bran Du
Fabien Regnier Archéologue, écrivain, chercheur et directeur de la revue Keltia Magazine
Le Monde Celtique continental à son apogée et les relations entre les peuples Celtes...
L'aire celtique s'étend à la période laténienne ( 3è et 2è siècle av J.C. ) soit à son apogée, de l'Irlande à la Turquie et du Portugal aux confins de l'Ukraine...
C'est un ensemble considérable qui s'est mit en place et qui sait structurer sans avoir recours à une volonté politique ou à un concept impérial puisque les Celtes ont toujours répudiés à ce type d'organisation étatique.
En ce sens, l'ampleur de leur expansion connue par l'importance de leur héritage qu'ils ont légué à leurs successeurs, ils constituent bien un ensemble de peuples fondateurs, conception plus réaliste que celle de peuples premiers...
L'une des particularités qui les distingue d'autres civilisations, c'est d'avoir pu fonder les spécificités de si nombreuses régions européennes (et la toponymie est là pour en attester) tout en se passant de toute forme de centralisme...
C'est ainsi que le monde celtique apparaît comme multiforme et reposait sur le maillage d'une multitude de peuples lesquels s'acheminaient alors à leur rythme du stade tribal à celui de la mise en place de véritables états dès le 3è siècle avant J.C....
La seule Gaule qui n'était après tout qu'une entité abstraite ne comptait pas moins de 350 peuples dont 295 sur le territoire de la France actuelle (La Gaule était plus étendue que la France puisqu'elle intégrait la Belgique, une frange Sud des Pays-Bas, le Luxembourg, la Rhénanie et un morceau de la Suisse...
Par contre, il fallait en retrancher le Pays-Basque et la Corse qui n'étaient pas gaulois...
On le voit au passage on est très loin de la centaine de peuples cité par Jules César dans la Guerre des Gaules...
Une de ces régions de cet ensemble gaulois doit retenir notre attention, c'est l'Armorique.
A l'époque celle-ci consistait en une étendue un peu plus vaste que la Bretagne actuelle, mais cette dernière en constituait l'essentiel...
Les peuples Celtes qui se partageaient le territoire de la Bretagne actuelle était au nombre de 7 et non de 5 comme on le dit souvent. En effet, aux Ossismes, Vénètes, Coriosolites, Redonnes et Nannètes s'ajoutaient les Ratiates et les Sesuives (petite peuplade)....
Les principaux de ces peuples sont bien connus et étudiés de longue date, l'archéologie ne cesse d'ailleurs de mettre constamment au jour de nombreux témoignages de ce que fût leur mode de vie et leur génie artistique...
L'un des aspects les plus spectaculaires de ce développement indigène est le monnayage... Celui-ci affirme l'émergence de plus en plus attestée de véritables états émetteurs et d'une exubérance artistiques fondées sur un symbolisme indéniablement celtique mais aussi sur des référents mythologiques qui sont devenus désormais intelligibles à la suite de nombreuses et récentes recherches...
Le monnayage, l'art, les artefacts, les coutumes culturelles décelables par l'archéologie, la toponymie, les pratiques religieuses parvenues à notre connaissance, tout atteste sans la moindre ambiguïté que les peuples armoricains de la Protohistoire sont rattachés à la civilisation celtique.
Prétendre le contraire ne peut relever que de la mauvaise foi ou de l'ignorance complète.
Prétendre l'en retrancher relève de la plus grande ignorance ce qui est évidemment la caractéristique des gens qui essaient de nier la profonde celticité de l'Armorique...
Bien qu'indépendants les uns par rapport aux autres, les peuples armoricains possédaient des référents communs tout à la fois symboliques et mythologiques.
Une frappe monétaire est significative de cet ensemble, c'est la diversité de la représentation de la déesse des combats avec sa lance et son bouclier ( Bodb ou Bodua en Gaule) et du cheval bicéphale qui l'accompagne... (Une figure, un répertoire présent et que l'on rencontre d'un bout à l'autre des territoires Celtes.)
Ce constat permet de mieux saisir la création de la ligue armoricaine qui se constitua pour faire face solidairement à l'invasion romaine au cours de l'été 56 avant J.C....
Quelque soit la manière dont on prend le problème et l'angle sur lequel on l'aborde, la réalité de l'appartenance des populations de l'Armorique Protohistorique du monde celtique ne fait aucun doute et c'est précisément l'intérêt de ce présent colloque de marteler cette vérité à un moment où pour des raisons non avouées il est de mise de nier et d'occulter cette réalité et cela ne doit rien au hasard.
En réponse à une question sur cette dernière phrase Fabien nous dira "qu'il y a des mesures prises dans un certain nombre de domaines qui sont toujours culturels (surtout sur le plan historique) afin de minimiser tout ce qui est celtique."
Notes Bran Du : Fabien Régnier à, de façon magistrale, ferme, claire, étayée et précise, démontré amplement (moultes arguments à l'appui) une réalité qui ne saurait être remise en cause. Un grand Merci à lui...
Bretagne Celtique ! Colloque Extraits
La place de l'Armorique à l'époque celtique...
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Barry CUNLIFF archéologue et chercheur...
Notes Bran Du :
Ce professeur émérite et d'autres chercheurs qui le rejoignent émettent l'hypothèse non retenue jusqu'alors et qui va à contre-courant d'une migration des Celtes de l'Est en Ouest ; laquelle hypothèse s'appuie surtout sur une donnée génétique... Tout ceci fait amplement débat aujourd'hui...
Cette position aurait pu être plus clairement, précisément, présentée et argumentée au cours de l'entretien, mais ce ne fut pas le cas au point que, parmi les questions émanées du public, elle sera posée en fin de débat et recevra une réponse mitigée sur le positionnement actuel des chercheurs et chercheuses à ce sujet o combien important...
Si la langue celtique s'est peu à peu élaborée au sein de la façade Atlantique, il fallait qu'elle soit comprise et accessible aux peuples dispersés sur ce vaste territoire... C'est une hypothèse pour la langue elle-même mais qu'en est il de l'origine des peuples Celtes, de leur provenance et migrations ?
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Barry Cunliff :
Oui, l'Armorique était essentielle aux temps Protohistoriques.
Si vous regardez une carte illustrant cette époque, l'étendue du territoire Atlantique allait de la Scandinavie à la péninsule ibérique et, en travers, jusqu'à l'Irlande...
Pensez aux traversées maritimes. Il était plus facile et plus sûrs de voyager par la mer...
L'Armorique se trouve au centre de cette carte et des déplacements d'alors...
Si vous réalisez que les matériaux voyagent par ces voies maritimes, ils ne peuvent pas éviter l'Armorique.
L'Armorique est le hub essentiel du voyage...
Hub : Informatique :
Appareil relié à plusieurs machines en réseau, et permettant de concentrer les données pour les transmettre par un unique canal.
Aéronautique :
Plateforme, dans un aéroport, réunissant des lignes en correspondance.
Prenons les mégalithes par exemple. On croyait que les allées couvertes s'étaient développées en Espagne ou plutôt au Portugal et qu'elles s'étaient répandues vers le Nord mais les recherches les plus récentes par une archéologue suédoise (Behina Sckule Paulsonn) démontrent l'inexactitude de cela...
Elle a regardé les moindres éléments de développement des tumulus et en a conclu que les plus anciens étaient en Bretagne dans le Morbihan comme le cairn de Gavrinis, de Barnenez, des endroits de ce genre.
(Datation les plus anciennes pour ces 2 monuments 4794-3999 et 4770-4034.)
L'Armorique était le centre récepteur d'idées venant de toutes les directions. C'était un endroit particulièrement créatif.
Je pense qu'il n'y a aucun doute que ce soit correcte si on regarde les plus anciennes évidences funéraires dans le Morbihan, on a des cystes en pierre et de longs tertres funéraires. Toutes les évidences sont là...
La nouvelle théorie est que les allées couvertes se sont développées en Bretagne et se seraient répandues en Espagne, l'Irlande, le long de la mer du Nord jusqu'en Scandinavie.
La Bretagne n'était pas seulement un carrefour maritime, elle avait aussi des liens tout particulièrement avec le centre de l'Europe via la vallée de la Loire et la vallée de la Garonne...
Notes Bran Du : D'autres chercheurs ont récemment démontré avec l'appui de technique scientifiques de haute gamme que le mégalithisme à sa source en Bretagne et, de là, s'est répandu, via la navigation côtière, en d'autres pays alentour...
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Ce que l'archéologie montre, c'est que ces vallées étaient des abreuvoirs, apportant des éléments de culture à l'Ouest venus du cœur de l'Europe.
Donc la Bretagne avait une place toute spéciale par vertu de sa position géographique et par vertu de ses richesses minérales dont l'étain qui devient si précieux à l'époque préhistorique...
L'Armorique e le Sud-Ouest de la Grande Bretagne produisaient beaucoup d'étain...
La générale supposition générale était que les Celtes ont aussi migré vers l'Ouest en Bretagne et vers l'Espagne. C'était la vision traditionnelle basée sur la lecture de la Bible principalement ( Sic ? ! Bran du)...
Des bretons ont développés ce point de vue au 17è siècle et cela devînt la vision de plus en plus acceptée... Les découvertes archéologiques ont été mise dans ce moule. Des choses marchent et d'autres ne marchent pas...
Le gros problème était l'idée d'une migration vers l'Ouest. Dans les années 60, 70, des archéologues ont dit que cela ne pouvait pas coller... Il n'y avait pas de preuves de ce mouvement vers l'Ouest...
L'Espagne spécialement est un problème ? Comment la culture Celte est telle arrivée dans la péninsule ibérique ?
Il n'y a pas de preuves archéologiques alors qu'on y parlait une langue celtique ? De plus, les auteurs classiques comme Hérodote affirment que les celtes occupaient tout l'Ouest de l'Europe jusqu'à l'océan y compris le Sud Ouest de la péninsule ibérique. Un autre auteur Grec Ephorus écrivant au 4e siècle av J.C. affirmait que les Celtes étaient expansionnistes et occupaient toute la péninsule ibérique...
Donc on a un problème à l'Ouest. Dans les années 60, 70, ont a décidé de mettre de côté la théorie, les anciennes idées et de regarder les preuves à nouveau.
Vous constatez que tout le long de la façade Atlantique depuis l'Espagne, la Bretagne, les Îles Britanniques jusqu'à la Scandinavie, qu'une société Atlantique s'est développée...
Elle a débuté à la période Néolithique au 6e millénaire avant J.C. Il y a une continuité massive. La mer commande tous les peuples mais aussi les rivières qui mènent vers l'intérieur comme la Loire ou la Garonne...
Ainsi vous avez ce réseau maritime de l'Espagne à la Scandinavie et le réseau fluvial reliant la façade maritime au cœur de l'Europe. C'est là que s'est d'abord développé la langue celtique.
J'affirmerais que l'on ne peut pas dire que telle poterie soit nécessairement celtique, nous ne pourrons jamais dire cela, mais nous pouvons dire qu'elle a été faite par un peuple qui parlait couramment la langue celtique.. et je pense que la langue est la chose la plus importante...
Où la langue celtique a-t-elle débutée ? Quel est le contexte de l'expansion ? Je commencerais par les preuves archéologiques qui montrent une communauté atlantique très importante et très créative à l'époque Préhistorique...
Cela commence avec l'arrivée des fermiers du Néolithiques. Ils sont venus de l'Est et se sont établis en Europe centrale et aussi à travers la Méditerranée jusqu'à l'Atlantique. Nous savons qu'ils ont atteint l'Atlantique au milieu du 6e millénaire avant J.C. Apportant l'agriculture, les animaux domestiques et tout ce qui va avec...
Des réseaux se sont alors développés qu'on peut voir dans les preuves archéologiques.
Les mégalithes en sont les preuves les plus impressionnantes...
Des chambres funéraires composées de gros blocs de pierre ont été construites et la Bretagne est connue pour ces fameuses constructions. Cela s'étend sur toute la façade Atlantique au 4e et 3e millénaire av J.C. Et au 3e millénaire en Irlande jusqu'aux Shetlands et le Nord des îles britanniques...
Si vous y réfléchissez cela représente un système de croyances, de comment vous enterrer les morts. Un complexe de croyances représenté par une certaine architecture associée à un art, des sculptures comme à Gavrinis par exemple...
C'est associé avec le concept du mouvement du soleil, des saisons, l'importance du ciel et des mouvements du soleil et de la lune. Tout ceci était incorporé. Les idées se sont répandues de l'Espagne à la Scandinavie...
Ce sont des idées complexes qui n'ont pu se répandre qu'avec des peuples qui se parlaient et communiquaient. Ce sont des idées complexes qui se sont répandues et développées au 6e et 5e millénaire avant J.C...
L'événement important c'est quand on a commencé à utiliser le métal ; le cuivre. L'extraction du minerai de cuivre aurait commencé en Espagne ou plutôt au Portugal vers Lisbonne...
Il fût alors introduit en Bretagne, en Irlande, au Pays de Galles etc... C'est une chimie très complexe cette extraction. Les gens qui travaillaient le minerai devaient communiquer entre eux avec intelligence et compréhension mutuelle...
Un aspect très intéressant comparé aux autres études archéologiques se situe quand ils ont commencé à fabriquer du bronze avec du cuivre et de l'étain. L'étain était concentré en Bretagne et dans le Sud de la Grande Bretagne...
Cet étain, on le sait, à l'époque Préhistorique, était exporté de la vallée de la Loire et, on le suspecte, via la vallée de la Garonne et à travers le seuil de Carcassonne, vers la Méditerranée. Les connections étaient animées et la Bretagne était au centre et au cœur du passage de l'étain venant de Grande Bretagne...
Les premières régions en Europe où on a fabriqué du bronze sont en fait la Bretagne, le Sud-Ouest de la Grande Bretagne et l'Irlande et ce dès 2100 avant J.C....
C'est un concept très complexe de mesurer les quantités exactes de ces deux métaux afin de les mélanger pour fabriquer un autre métal. Les idées se sont répandues et pour moi sont au cœur de la culture Atlantique...
On a trouvé du minerai de cuivre extrait dans la péninsule ibérique est utilisé en Scandinavie...
On trouve des armes, des fers de lance, fabriqués en Irlande et utilisés dans la péninsule ibérique. Les idées se déplaçaient.
Je pense que la langue celtique s'est développée dans cette même zone...
C'était une « Linga Franca » pour pouvoir communiquer des idées et cette langue s'est naturellement répandue le long des rivières vers le cœur de l'Europe continentale. Cet arrière pays fluvial faisait partie de cette culture et de ce complexe d'idées partagées...
Quid du sujet de la théorie de la continuité Paléolithique ?
La continuité Paléolithique est une théorie intéressante. Si vous regardez les composantes génétiques des peuples de la Préhistoire de l'Europe de l'Ouest vous découvrez qu'il y a 3 composantes :
La première est celle des chasseurs-cueilleurs du Paléolithique, cet ADN est définitivement là dans notre population Atlantique.
La 2è est celle des fermiers venus du Moyen-Orient.
La 3e composante est celle des peuples des steppes venus de Russie un peu plus tard...
On retrouve ce tout dans le mélange des gènes...
Si vous regardez les peuples que l'on considère Celte descendent-ils du Paléolithique ?
Oui, ils ont une composante Paléolithique dans leur ADN.
Pour moi, je n'affirmerais pas cette continuité, car pour moi, parler une langue celtique est la marque d'une culture celtique.
Les langues celtiques qui sont des langues indo-européennes n'ont pas pu exister avant le 6e millénaire avant J.C. Au plus tôt et certainement pas avant...
Les peuples avant cette époque ne pouvaient d'aucune manière parler une langue qui se rapprocherait même de loin de la langue celtique.
La langue est le marqueur principal. Je le pense en ce qui concerne ce qui est celtique.
C'est la manière la plus simple...
Pour résumer, quels sont les éléments les plus remarquables de la civilisation celtique et la culture en Bretagne ?
C'est une question très difficile. Je dirais que c'est vraiment la manière dont le paysage est utilisé et vénéré et l'utilisation en particulier des menhirs. C'est une tradition qui parcoure la culture bretonne...
Le développement de l'art des allées couvertes qui est vraiment une spécificité bretonne, c'est un art remarquable auquel on s'est trop peu intéressé.
Et aussi, la Bretagne fait partie de cet ensemble qui comprend le Sud-Ouest de la Grande Bretagne, le Pays de Galles et l'Irlande où le bronze fut développé en tant que matériau.
La Bretagne est partie prenante de cette culture remarquable. Ce qui la distingue, c'est l'utilisation du cuivre, de l'étain, du bronze, de l'or qui font que ce fût une zone importante et puis les menhirs... Je suis fasciné par cela...
Dans cette tradition on a au début les menhirs primitifs du Néolithique et puis quand on arrive à l'âge du fer du premier millénaire av J.C. Les pierres sont magnifiquement travaillées.
C'est toujours les mêmes menhirs mais travaillés magnifiquement, des fois facettés, des fois mis au carré, des, parfois, cannelés. C'est la même idée de continuité au soin de ces menhirs modifiés...
Certains, très peu, on ce que l'on appelle de l'art celtique, des volutes de végétation et puis cela continue à l'époque romaine et au Moyen-Âge avec les croix etc...
On peut ainsi voir que la Bretagne à une culture profondément enracinée qui se manifeste de manières différentes à des moments différents mais qui représente une continuité...
Je pense qu'il y a une réelle continuité mais que nous devons toujours penser aux réinventions, que les choses peuvent être réinventées. Mais de beaucoup de façons la réinvention est une continuité. On réinvente quelque chose car on veut se reconnecter avec le passé. On doit faire la différence entre ce qui est une réinvention imposée et les réinventions locales...
Je dirais que le cœur de la continuité qu'offre la Bretagne, c'est l'éloignement. On parle sans arrêt de cette collectivité mais la Bretagne est éloignée de l'Europe. En tant que péninsule elle est capable de se maintenir et de maintenir la cohérence de son ADN face à des tas de mouvements dans le reste de l'Europe... (Voir l'héritage de cet ADN)...
Les menhirs dont j'ai parlé plus tôt représentent une forme de cette continuité (ce sont plus précisément à l'Âge du fer des stèles et d'énormes sphères en pierre. Note Bran Du)...
Le sens de l'attitude envers la mort est très intéressant . Les tombes collectives que j'ai trouvé dans les tombes mégalithiques, l'idée que l'on ne mettait pas seulement les os dans un trou en terre, le rebouchant une fois terminée et peut-être une génération plus tard, on les déplaçait et on y mettait d'autres ossements... C'était là la nature de ces tombes mégalithiques collectives...
C'est une tradition dont à parlé Charles le Goffic à Trégastel en Bretagne au 19e siècle.
Les enfants étaient enterrés pour 7 ans puis les tombes étaient ouvertes et les os étaient nettoyés et déposés dans un ossuaire. C'est une sorte de continuité...
C'est une continuité dans la manière dont on traite les ancêtres et la mort. Donc on peut relier tout cela...
Une autre forme de continuité, c'est la « Toussaint » et le festival celtique de Samhain. L'année celte était divisée en quatre partie (essentiellement 2 avec 6 mois de jours et 6 mois de prépondérance de la nuit ou de l'obscurité. Note Bran Du.)
L'année finissait le 31 octobre et un nouvel an commençait. Il y avait cette période luminale ( ? Liée à la lumière, au lait ?) dangereuse entre l'ancienne et la nouvelle année et c'était l'une des 4 cérémonies celtiques qui étaient fêtées...
C'est aussi dans la littérature celtique. L'idée était qu'entre la fin de l'année et la nouvelle il y avait cette période luminale dangereuse durant laquelle les esprits des morts pouvaient sortir de la terre et revenir. C'est exactement ce qu'est la Toussaint.
C'est si fortement représenté en Bretagne , bien plus qu'ailleurs. C'est réinventé en tant Halloween en Grande Bretagne et en Amérique mas il y a un aspect réel de continuité qui émerge. On revient toujours à l'idée de lieu et à la vénération que les bretons ont toujours eu pour les paysages, le marquage par des croix par exemple, les pèlerinages comme les pardons font tous partis du sens de la Terre marquant la Terre à certains moments de l'année...
Si vous lisez le folklore durant le 19è siècle ; il y avait une signification profonde de paysages qui parlent/ des paysages qui font écho au passé. Ernest Renan, un autre grand poète breton, qui écrivit des poèmes sur le peuple celtique parle de la terre et dit : « La terre et le peuple ne font qu'un ». C'est une chose qu'on ne pouvez avoir que si vous maintenez votre éloignement, avez gardé les autres en dehors et êtes restés sur votre terre.
Je trouve remarquable que les bretons finissent toujours par revenir chez eux en Bretagne à l'endroit de leur enfance et ce beaucoup plus qu'en Grande-Bretagne. Vous êtes bien plus connectés à la famille et à la terre, à l'endroit où vous avez grandi. En Grande-Bretagne les gens ont la bougeotte...
Il y a beaucoup d'éléments en faveur d'une continuité. C'est facile d'exagérer ces éléments ou de les romancer, mais c'est aussi facile de les rejeter et les rejeter est, je le pense, une erreur...
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Corinne POULAIN Directrice des « Champs Libres « à Rennes. Propos sur l'exposition « Bretagne Celtique ? » tenue en ses locaux...
Actuellement : La Bretagne dans la peau : La fabrique du patrimoine à l'heure des droits culturels.
« …..La Polémique survenue lors de cette exposition est intéressante. Elle a permis de prendre conscience à quel point aujourd'hui encore en Bretagne et ailleurs la fabrique du patrimoine se fait selon des sillons parallèles entre eux ( les Universités, les conservateurs des musées, L'INRAP, les revues bretonnes de grande qualité, les très nombreuses et très actives associations et les personnes, témoins et détentrices de pratiques et d'histoires) font qu'une culture est vivante ou non...
Je pense qu'il nous faudrait retrouver les conditions pour que toutes ces parties prenantes dialoguent, débattent, pour que nous croissions nos forces et œuvrions en complémentarité...
Ce qui me touche, c'est la façon dont les gens, les personnes, dans leur diversité réussissent à créer de la beauté, à renouveler en permanence la culture, c'est-à-dire notre rapport de sens au monde. Ceci, malgré la standardisation et la commercialisation ambiantes à l’œuvre...
Nous sommes des déshérités mais il y a toujours cette capacité vivante en action puisant dans le passé, dans nos paysages, dans notre sensibilité...
Ceux qui nous ont précédé ont réussit à perpétué cela et ce malgré leur immense misère et le poids du travail, le mépris dans lequel ils étaient tenus...
Ils ont créé du beau, en brodant, en donnant des formes aux objets, en sculptant par les chants, les contes, les danses, soit par autant de flammes... »
Corinne rappelle par ailleurs :
Qu'il n'y a aucun enseignement de l'histoire de la Bretagne nulle part dans nos écoles...
Que beaucoup d'entre nous ne savent pas que le breton est une langue celte ni qu'elle est la seule langue celtique parlée sur le continent !
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Rozenn Milin Pst du Conseil Culturel de Bretagne et historienne...
Mon identité à été fortement imprégnée par la langue bretonne. On ne peut oublier d'où l'on vient et rien ne pourrait effacer cette empreinte...
Une part de nous est celtique par la langue...
J'ai 4 strates d'identité : la bretonne et celtique, la française, l'européenne et la citoyenne du monde...
Une identité multiple donc qui me fait solidaire dans notre humanité du monde et invite au partage et à la bienveillance...
Les identités uniques n'existent pas.
Nous sommes tous le fruit d'années d'expériences et d'échanges.
Nous sommes tous un empilement de briques diverses qui constituent en quelque sorte notre maison et j'ajouterais que finalement nous avons une grande chance que de pouvoir revendiquer cette identité multiple, parce que nous sommes plus riches de tout ce qui nous compose et d'autre part, cet empilement nous permet une formidable ouverture d'esprit et ce contrairement aux esprits chagrins qui se revendique d'une seule identité monolithique et qui ne se rendent pas même compte que cette identité étriquée leur ferme les portes du monde et les empêche d'en voir toutes les richesses....
Notre part d'identité est menacée...
les différentes composantes de notre identité multiple ne sont pas sur un pied d'égalité. Certaines sont dominantes quand d'autres sont fragilisées...
Les langues et la culture bretonne et celtique sont toutes menacées de disparition à des degrés et des échéances divers. C'est-à-dire que la part bretonne et celtique de mon identité risque d'être balayée alors qu'elle en est la base même et la partie la plus sensible et sans doute la plus profonde.
Qu'on ne se trompe pas et malgré le succès florissant des festivals celtiques, de leur réussite impressionnante, ceux et celles qui portent chaque jour sur le terrain les différentes facettes de notre culture savent à quel point ce n'est pas si rose...
Les musiques bretonnes si elles sont, ici à Lorient, sur le devant de la scène n'ont pas accès aux grand médias...
Elles n'ont parfois pas même accès aux salles de concerts...
Les écrivains bretons n'ont pas accès à l'école...
Et, surtout, la situation de la langue qui est un marqueur fondamental de notre identité est vraiment préoccupante...
Pourquoi a-t-on voulu que la génération descendante que nous étions change d'identité ?
Parmi les raisons qui ont conduit le peuple breton en son entier à changé de langue, on peut avec certitude pointer la responsabilité de l'Etat qui a élaboré depuis la période de la Terreur sous la Révolution une idéologie hostile à toute diversité sur le territoire de la République (1870-1940).
Dès que l'école a été rendue obligatoire en 1882, elle a mis en œuvre une politique volontariste d'éradication des langues minoritaires et ce de la façon la plus brutale et, hélas, la plus efficace qui soit...
Toutes les langues celtiques ont été combattues et mises en Danger Notamment par les tenants de la langue anglaise et de la langue française...
Toutes les langues sont aujourd'hui en position difficile car elle sont minoritaires dans leur pays et elles pourraient toute disparaître avant la fin de ce siècle...
Si des mesures haddocks ne sont pas prises, ne sont pas mises en œuvre pour les sauver alors qu'elles sont le socle de notre identité...
On estime environ à 200 000 personnes qui connaissent le breton... Une convention avec l'état s'engage à former 30 000 élèves en breton d'ici 2027 (19 000 actuellement). Ce passage de 5 à 8 % de formation ne peut suffire, 92 % des éléves eb Bretagne ne connaîtront pas cette formation...
Au Pays de Galles l'objectif de l'état est d'atteindre un million de locuteurs d'ici 2050 ! (actuellement 538 300 locuteurs)...
Si la langue bretonne venait à disparaître que resterait-il de notre identité bretonne, de notre identité celtique ?
Qu'est-ce qui nous permettra d'affirmer notre identité celtique qui ne serait pas un simple folklore de circonstance ?
Est-ce que nous nous contenterons d'une folklorisation de notre identité ou est-ce que nous aurons l'ambition qu'elle reste authentique mais néanmoins vivante et créatrice ?
Si nous voulons réellement conserver, maintenir, la part bretonne et la part celtique de notre identité, car c'est belle et bien elle qui prouve notre appartenance au monde celtique de façon incontestable, nous devons donc tout faire pour qu'elle survive, qu'elle se développe et quelle soit un outil de création...
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Autres Notes conclusives Bran Du:
Ce colloque riche en interpellations tourne autour d'un axe qui s'appelle la quête d'identité laquelle est essentiellement et fondamentalement constituée à partir de la langue bretonne en grand péril comme on sait...
D'autres fondements déterminent et prouvent que la Bretagne est non seulement indéniablement celtique mais aussi dans la préhistoire le centre d'un « arc atlantique » à partir duquel circulent autant les biens, les personnes que les idées et notamment l'idée mégalithique originaire de la dite Bretagne plaque tournante aussi des minéraux échangés et transformés...
La « continuité » de la culture occupe une grande place également dans ses débats, ceci illustré par des intervenants très compétents dans leur démonstration...
L'interrogation sujette à la polémique revisitée n'a plus lieu d'être, la mise au point a évacué définitivement le point d'interrogation sujet de cette polémique, la Bretagne est indéniablement celtique et le restera de par sa volonté...
Il ressort également de ces débats que si la conception celtique est bien avérée et validée des structures panceltiques mettant en œuvre cette identité ont du mal à se développer et à se concrétiser...
Notamment dans le domaine économique alors que culture et économie peuvent parfaitement se conjoindre et se renforcer mutuellement pour un bénéfice commun...
Il appartient à mon sens aux pays Celtes à un moment où l'Europe vacille et que les emprises étatiques sont appelées à se diluer de concevoir une forme « d'Europe des régions » s'appuyant sur les dimensions et façades maritimes communes...
Une unité « celtique » serait lors la base de dynamiques faisant synergie d'énergies sur tous les plans.
Reste cette notion « d'unité » à laquelle aspire les dits pays celtiques, mais qui reste encore trop confrontée à des retenues et à des hésitations...
Elle n'aura d'avenir concret et objectif que lorsque on osera enfin la mettre en œuvre réellement...
L'appel à l'Unité parcoure l'ensemble des débats, appel à des renforcements de liens existants mais encore trop timorés...
La culture certes est le domaine le plus avancé et le plus pratiqué en terme de liens mais ne représente qu'une part de cette volonté d'unification...
La défense de la langue est plus que préoccupante car sa disparition souhaitée par l'Etat français depuis le Révolution couperait le lien identitaire le plus fondamental...
Le combat « majeur » se trouve là.
Pour ce qui est de nos luttes et de nos combats en faveurs de la Tradition celto-dtuidique, sa mise à connaissance, son enseignement, ses pratiques religieuses, sa transmission sous touts formes, nous sommes dans des situations apparentées...
Et les réflexions menées pendant ce colloque sur l'identité celtique et bretonne nous concerne pleinement et pourraient aussi, pour une bonne part, être les nôtres...
Comme eux nous savons parfaitement que « ce qui réunit est plus fort que ce qui divise. »...
« Que l'on peut ne pas être Celte mais que l'on cherche à le devenir. »...
(Xavier Grall nous disait que « l'on n'est pas breton, on le devient. »...)
Et Alan Stivell : « Conjuguons nos racines et nos archaïsmes, faisons fructifier cela dans un équilibre que nous savons relatif... » « Rétablissons une situation plus naturelle, plus en rapport avec la nature... »
Il s'agit de « donner des clefs pour ouvrir des portes jusque là retenues fermées. »
«... de construire un monde celtique qui soit vraiment un enjeu de société...» « de redonner du sens à nos territoires »...
« de faire rempart aux réécritures qui nient les réalités »...
Ce colloque aurait réunit 500 auditeurs soit la limite autorisée pour des raisons de sécurité... Son succès amène les organisateurs a réitérer un tel colloque en 2024 en un lieu apte à recevoir plus de visiteurs...
Il semble bien que comme nos Assises d'avril 2023, certes bien plus modestes et de très loin, des dynamiques s'instaurent à la suite de ces événements peut-être parce que les idées (l'idée d'unification assez poussée des « Nations Celtes » à au moins plus de 100 ans d'âge – la création de la Gorsedd de Bretagne en 1900 est un des éléments fondateurs de cette recherche d'unité) arrivent à un moment de notre histoire où l'humus sociétal, le terreau contemporain, est à priori plus apte à recevoir certains ensemencements....
Les extraits du colloque permettent une approche non exhaustive de celui-ci et je vous invite à l'écoute en totalité de celui-ci sur Youtubes en remerciant tous les acteurs et artisans de cette belle et prometteuse réalisation...
Colloque Bretagne Celtique :
https://www.youtube.com/watch?v=rM3WjHrTsHg
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