Les dits du corbeau noir

CELTES REVERIES Bran du nuit du 15 08 2012

CELTES REVERIES     Nuit du 15 08 2012   Bran du

En mon Pays d’enfance se tient, à quelques encablures du rivage, une île appelée le Verdelet laquelle, selon des conditions climatiques spécifiques, se trouve parfois ennoyée par des chapes de brume qui l’estompent au regard…

J’aime à penser, lors, que, derrière ce manteau d’ombres mouvantes, se tient la fameuse Ile d’Avalon encore nommée Tir n’a Nog ; sœur de l’Ile des Femmes et des Plaisirs, de la Terre des Jeunes et des Vivants, de la Grande Plaine…

Il m’est facile d’imaginer, en cet îlot rocheux ponctué de mouettes et de goélands, la présence d’un verger aux pommes d’or et d’argent au mitan duquel coule une blanche fontaine dont la source verte et bleue répand le chant en cascades de cristal…

En ce jardin féérique que l’on dit aussi « Jardin de Joie » se tiennent neuf femmes consacrées , chacune représentant une vertu qu’elle incarne dignement…. Il m’est cependant difficile de dépeindre la beauté de chacune d’entre elle, ma palette de mots étant bien pâle face à tant de splendides lumières appelant un regard venu du cœur apte à se tenir entre l’aveuglement et l’éblouissement…

Un seul écrin pour neuf pierres précieuses : neuf gouttes de rosée sur la feuille du matin, neuf coquillages nacrés dans les rouleaux d’écume; neuf notes de musiques chantées et harmonisées à l’unisson, neuf pas de danses dans les chorégraphies de l’aube et du crépuscule, neufs gestes purs dans la salutation solaire, neuf lèvres offertes pour la parole nue, neuf flammes conjointes dans le brasier du cœur, neuf offrandes d’amour dans la corbeille du jour…

Sous un houx et un chêne qui entrecroisent leur ramure dans l’alternance des saisons se tient, sur un socle taillé dans le granit, un roi qui semble lui aussi de granit… Deux aigrettes se tiennent à ses pieds et un « roitelet » est posté près de sa tempe semblant murmurer au gisant de pierre de sages conseils sur le sommeil et l’éveil de ce qui fut est et sera…

En une autre île, guère éloignée d’ailleurs, mais au sein d’un monde végétal, se tient une clairière ceinturée elle aussi de chênes et de houx mais hébergeant aussi un magnifique hêtre que l’on dit « être » le « patron des voyageurs » tant ses branches basses invitent à l’accueil et au serrement sur sa poitrine ceux et celles qui cheminent dans les sous-bois de la rencontre, sous les futaies de la renaissance, dans les halliers de la recouvrance…

Cerfs, faons, biches et meutes de sangliers s’y rendent quand résonne l’appel d’une étrange corne qui fait trembler les herbes et les feuilles… C’est l’appel du « Grand Corps Nu », le maître de vie et de mort, le Grand Régent des sèves et des sangs, celui a qui obéissent le bélier et le serpent, celui qui a assise sur le fondement de toute chose, celui qui veille sur l’équilibre et l’harmonie des mondes…

C’est aussi en ce mitan, en cet espace médian qui arbitre ombres et lumières, qu’un couple devise entre soleil et lune, lune et soleil, étant l’un et l’autre et les deux conjointement et complémentairement…

Le silence écoute le doux flux qui s’écoule des bouches aimées, les feuilles se tendent vers cette source limpide prodigue en clarté…

«  - O mon âme vive que mon sang traverse sur l’échine des songes, sens-tu le parfum de mon être que libèrent tes rayons d’or, entends-tu cela qui bat dans la forge de ma poitrine forgeant l’épée d’entendement… »

- Oui, je le sens, oui , je l’entends, mon doux ami ; la senteur d’amour m’enveloppe comme l’aurore enceint les prairies de la terre et du ciel ; le rythme de ton cœur m’entraîne sur la piste du jouir, dans les entrelacs de chair et de sens, dans l’enroulé des vagues qui se répand sur notre grève offerte… »

Je sentais cela et j’entendais cela malgré la distance et l’éloignement dans lequel je me tenais…

D’autres bruits sourds me parvenaient encore comme jaillit des entrailles de la terre, là sous l’humus et le schiste pourpré… Des incantations sortaient d’entre les pierres, semblaient monter en spirale dans la colonne d’air qui l’accompagnait ainsi que des effluves âcres et douces à la fois…

Qu’étais-cela qui s’emparait de moi, envahissait mon corps, s’immisçait en chaque recoin de ma pensée, assiégeait mon cerveau, circulait en mon sang et affolait mes sens ?…

Je ne pouvais lors le dire, c’était comme une nuée d’oiseaux blancs et noirs me recouvrant de leurs ailes entremêlées, comme un suc distillé dans les cornues de mon être, comme un mot ensilencé et ciselé dans ma chair… J’étais cela, cette chose indicible, cette nuée, ce suc, ce mot indicible flottant dans des nuées inconnues…

Quand les brumes se retirent, je retrouve mon paysage d’enfance que survole mon âme du levant au couchant, du couchant au levant… Je peux la suivre quand elle remonte les courants, plonge dans la vasque d’émeraude, virevolte dans l’air ascensionnel, crie sa joie d’être libre et nue… Elle me fait lors signe d’attendre, de prendre juste patience… car elle me reviendra un jour, une nuit où mes paupières cousues de brume se fermeront sur les rivages perdus, égarés, immenses et infinis, de mes jours et de mes nuits…

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N.B. : Il appartient à chacun, à chacune, de faire place en ses rêves en ses songes, à Arthur, à Morgane, à Viviane et à Merlin car ils sont l’Etoile et le Chemin, la Fin et le Recommencement, l’Eveil et la Dormition, la Clairière et le Chaudron…

Cela qui fut, demeure, advient…

Entends, enfant du Druide et toi, fille de la Laie aux blancs seins…  La parole s’en vient…..

« - Ainsi sons, sons, sons…  les douces vibrations ! »



15/08/2012
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