Les dits du corbeau noir

CAP au NORD (5) Les 3 NORMES + CONTE "LE CRI NOUVEAU NE" BRAN DU 28 04 AVRIL

 

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photo Bran du

 

 

 

 

Cap au NORD (5) Bran du

 

 

« ...Peut-être les âmes partent-elles vers le Nord lors du dernier voyage, pour se fondre à cette blancheur qui semble avoir instauré un règne sans limite de temps et d'espace...

Peut-être vont-elles se mêler à la grande source et rejoindre, comme une matière initiale et indéterminée, les forces neigeuses avant d'être reformulées, libérées à une nouvelle vie, avant d'être livrées à une nouvelle errance...

 

Ainsi le Nord est-il le lieu où se noue la redite du temps, celle des âmes et des choses...

Ici est le monde blanc, toujours à réinventer, à peupler d'êtres soustraits au néant et au désenchantement, à combler d'images aussi fugaces et indéfectibles que l'envol d'une oie ou d'un cygne dans le contre jour des contes et des songes. »..

 

Marc Nagels Les Îles du Nord du monde (extraits)...

 

« La mer à cette faculté d'aspirer la vie et les songes !

L'idée de Dieu ne se rapporte-t-elle pas à une sphère dont le centre est partout et la périphérie nulle part ? » (Idem)

 

.../....

 

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Le Nord ou la frayère d'un Verbe dont les alevins sont les futurs poèmes qui remonteront le cours de l'existence allant de la source à l'estuaire et remontant de l'embouchure aux primes jaillissements...

Le Nord est assurément la sente de Lumière, l'écrin de ce diamant blanc dans lequel joue le soleil et murmurent les étoiles...

Bran du

 

 

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Les Trois Normes Bran du 28 04 2018

 

Trois et trois et trois...

Ainsi sont les barreaux de l'échelle ;

ainsi sont les neuf encoches de jours et de nuits...

 

Trois elles sont ;le Normes du destin...

Trois qui veillent autour du puits d'Urdhr ;

Trois avec le Dragon qui sait, qui voit, qui entend

cela qui anime la pensée et le geste, qui pèse l'intention,

qui mesure la braise et la cendre...

 

Chacune sait ce qu'il en sera de la chair et du sang,

de la forme du vivant à venir...

Chacune à touiller le chaudron bouillonnant...

Chacune à brasser le passé, le présent et le futur...

Trois à se mirer dans la fontaine de Minir, trois à faire miroir, trois à donner reflet à cela qui, fût, qui est et qui devient...

 

Trois sous l'Arbre le plus ancien...

Trois sous les branches de la Parole première,

trois sous le signaire des runes entrecroisées,

trois à puiser dans l'alphabet des origines...

 

Yggdrasill est son nom ;

cinq Cerfs y affûtent leurs bois, donnent force aux saisons dans l'entrelacs de leurs ramures...

 

L'Aigle et le Faucon, ceux-là portent messages de feu et d'eau, d'aube et de crépuscule, de rosée et d'écume ; ceux-là donnent des ailes à la Parole des sages et nourrissent l’œil qui affouille l'Univers...

 

L'homme et la femme, tous deux nés de l'Arbre des Anciens....

Du sang sous l'écorce, du songe circulant en leur aubier...

Quatre saisons pour l'une et pour l'autre, quatre pour enfanter, quatre pour mettre au monde entre les brumes de chaleur et les glaces qui figent les rêves de printemps...

 

L'Arbre soutient le ciel ; l'aurore s'y pose avec l'espérance des êtres et des choses...

L'Arbre nous enveloppe de ses feuilles qui s’adonnent aux caresses du vent...

L'Arbre attend en ses fourches que s'y construise le nid de nos plus justes désirs...

L'Arbre nous instruit de nos fruits et semences...

L'Arbre cosmique, le Frêne de Mémoire, à racines de Lumière...

 

......

 

 

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Le Cri Nouveau né   Ban Du    Avril 2018

 

 

Flocon après flocon, la neige depuis plusieurs semaines, étirait son poème sur l'étendue des terres...

 

Le silence, de nouveau, se faisait entendre dans le crissement des arbres se frottant l'un contre l'autre pour se réchauffer des morsures du gel et de la glace...

 

Les hommes et les femmes de la contrée se réunissaient autour des feux que les uns et les autres entretenaient pour conforter le sentiment de communauté et de solidarité qui sied à ceux et à celles qui se savent dépendants de leurs semblables pour assurer leur propre survie...

 

Il suffisait d'entrer respectueusement dans le cercle d'accueil, de s'asseoir en face du chef de famille et de porter à sa bouche le morceau de viande séchée offert par celui-ci....

 

Le temps de mastiquer la rude texture de ce qui fut un morse suffisait pour que les oreilles soient prêtes à entendre des nouvelles de ce dehors dont les agitations décroissaient au fur et à mesure des avancées rigoureuses de l'hiver...

 

Non loin du campement, des piliers enfoncés en cercle et surmontés de crânes de cervidés pour les uns, de plumes d'aigles et de corbeaux pour les autres, délimitaient un espace que seuls les esprits étaient de nature à occuper, le temps d'une invocation appropriée et d'offrandes faites à leur intention...

 

Même les lièvres, les loups et les renards se tenaient à distance de cet endroit que le vent visitait en entrechoquant les os à son passage ce qui ne faisait qu'ajouter des sons assez lugubres à son humeur déjà bien irritée...

 

Une femme (et son enceinte de vie future) se tenait assise au centre de l'assemblée...

 

Une pâle lumière éclairait la ronde des visages peints, pour certains, de lignes ondulantes et de courbes faites avec de l'encre de poulpe mélangée avec du sang animal...

 

La femme était nue sous l'épaisse fourrure qui la recouvrait ; une fourrure dont la chaleur se répandait aussi dans les cœurs assemblés autour d'elle...

Sur sa poitrine de neige reposait un collier fait de grain d'ambre et de dents de morse...

 

L'Ancien entonna une suit de sons graves, presque gutturaux aussitôt reprise par les autres ; une sorte de mélopée lente et très « archaïque » qui se mit à circuler d'une bouche à l'autre, d'une lèvre à l'autre...

 

Le chant enveloppait la parturiente, caressait son ventre et la promesse de celui-ci, imprégnait la chair tendue de vibrations bienveillantes et bienfaisantes...

 

C'était un chant tout gonflé de sèves nouvelles, d'aubes printanières d'éclosion de feuilles et de nids...

On pouvait y entendre le vol soyeux des oies revenant de leur long voyage pour peupler le ciel d'ailes juvéniles issues de leurs accouplements....

 

Le chant de la femme s'éleva lors de son promontoire de silence et se mit à planer comme un aigle blanc au-dessus de la mélopée des hommes en décrivant des cercles qui semblaient se perdre dans l'infini des nuées et des songes tout en enfonçant des racines dans l'humus du cœur...

 

La flamme se mit à trembler dans la coupelle d'huile...

La femme se leva et sortit, lors la nuit s'engouffra dans l'igloo sans pour autant éteindre la lumière qui brillait dans les yeux et les poitrines...

 

Le vent était son ami... Il entrait et sortait par sa bouche, s'enroulait à la matrice de vie, au cuir fragile de la peau par laquelle la vie respirait la vie...

 

Il animait la fulgurance, la flamboyance, de la clameur de l'homme et de la femme faisant flèche de l'arc de leur désir et de leurs offrandes...

Il consumait le taillis des peurs, le fatras accumulé des branches mortes d'incertitude et d'ennui...

 

Il redonnait une joyeuse et rouge verticale à cela que l'ignorance et la crainte tenaient alité, entretenant sans cesse une longue maladie de langueur, de renoncement, de résignation...

 

Le feu aussi était son ami, avec lui fondaient les glaces de l'orgueil, le gel du mensonge, la banquise de l'arrogance...

 

Tous ces recouvrements obscures et pesants faisaient alors place

aux terres ré-fécondées et refleuries ; à une Taïga de nouveau parcourue par la danse des abeilles et le rire des jeunes filles...///...

 

 

 

La femme mordait à pleine dents un os long tenu dans sa bouche par des lacets de cuir passés autour de son visage...

Elle se tenait accroupie, chaque main enserrant un bâton en bois fiché de part et d'autre de ses flancs...

 

Elle dit :

«  - O Vent très doux et très fort, Vent qui fût connu du Père de nos pères, de la Mère de toute mère, souffle avec moi, respire profondément en moi, expulse avec moi, fait jaillir avec moi, de mon ventre, le cri nouveau né. »

 

C'est alors que celui qui avait geste et parole de feu v$int vers elle. Il sortit de son sac à magie une petite gourde et versa trois filets d'eau sur son front...

Il dit :

« Que cela qui fût retenu neuf mois en ton ventre jaillisse, s'écoule et ruisselle de la fontaine de chair... Que cela rejoigne le ru, la rivière et l'océan de vie en frétillant comme un vif saumon animé de sa pleine vigueur. »...

 

Il posa ses doigts sur la sueur qui coulait des tempes de la femme et dit :

« Les pierres ont fait naître l'étincelle de joie et la forêt du possible est venue danser devant elle... Le bois a célébré les noces et les embrassées de leurs alliances...

Il est venue une braise nouvelle au foyer de la vie...

Nulle cendre ne pourra l'étouffer ou l'éteindre tant que la vie la veillera de son souffle attentionné et tant que tu souffleras avec elle sur l'âtre entretenu des jours et des nuits. »...

 

Il fit trois tours dans le sens du soleil et l'enceinte ainsi formée fut soudain enveloppée d'un cercle de petites flammes dansantes...

 

L'homme-feu s'en retourna alors, mettant ses pas dans ceux du silence...

 

Sous l'igloo, l'Ancien reprit parole et dit :

« L’œil est venu à la Baleine ; un œil de glace et de feu...

L’œil brille dans le ciel ; la nuit brille d'un nouveau feu...

L’œil qui est venu, celui-la remembre les os éparpillés du devenir ; il saura conduire les hommes sur la piste du sang et des rêves... Bienvenu a cela qui sait marier la flamme et la neige. »...

 

Les hommes sortirent l'un après l'autre pour contempler le ciel et la constellation-Mère... Ils virent l’œil immensément ouvert et le grand souffle étoilé de la voie lactée...
Chacun hocha la tête puis ils firent un grand cercle de leurs bras...

 

Sous la blanche et lumineuse rotonde l'Ancien s'était éteint...

 

 

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Textes autochtones (Amérique du Nord) Kenneth White (Territoires chamaniques) Ed Héros-Limite

 

 

« Quelque part

quelqu'un

parle

 

Du Nord

la tribu de la pierre sacrée

parle

 

Vous entendez

quelqu'un

quelque part

qui parle. »

 

 

« Brillant sont les cimes des frênes ; ils sont grands et blancs, là où ils poussent près du torrent.

Brillant est la cime du saule.

Joyeux le saumon dans le lac.

Le vent siffle dans les hautes branches.

Brillantes sont les tiges des bruyères .

Brillante est la fleur du trèfle.
Brillante la rive du ruisseau.

Brillante la crête de la montagne.

 

Les dons de nature valent mieux que l'instruction.

 

Devenez lumineux, devenez blanc.

Lumière de la terre, lumière du jour, vie...

Faites qu'il y ait de la lumière

Voyez et faites que l'on voie. »

 

...

 

« Nous sommes les étoiles qui chantent.

Nous chantons avec notre lumière.

Nous sommes des oiseaux de feu.

Nous volons au-dessus du ciel.
Notre lumière est une voix.

Nous faisons une route pour les esprits ; pour que les esprits passent. »

 

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« Jusqu'au fond, tout au fond, il fallait accomplir le voyage. »

K White (Terre arctique)

 

« Racine de la terre, grande racine de la terre, je te donne les paroles d'un chant ;

le blanc vient, le blanc gagne les noires piliers du monde... »

(Idem)

 

« Une montagne blanche se dresse à l'Ouest. Elle est très belle, elle est rayonnante, ses rayons de lumière brillante illuminent la terre. »

(idem)

 

«Des plumes blanches, des plumes blanches et duveteuses, volent, volent devant le lever du soleil, à l'orée du monde. »

(idem)


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28/04/2018
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